Régime militaire au Niger : Samira Sabou dénonce des atteintes à la liberté d’informer

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Samira Sabou, journaliste nigérienne.

Dans un message énigmatique posté sur ses réseaux sociaux, l’activiste Samira Sabou, connue pour ses critiques, annonce la suspension de toutes ses publications. Elle explique avoir été contactée par un militaire qui lui reproche d’avoir partagé le message du président déchu, Bazoum Mohamed, paru dans la presse ce vendredi. Cette situation intervient après la suspension des programmes de la Radio France Internationale (Rfi) et de la télévision France 24 dans le pays.

Samira Sabou est une figure emblématique de la société civile nigérienne. Depuis plusieurs années, elle est engagée dans la dénonciation des abus de pouvoir et les violations des droits humains sous les régimes des présidents Mahamadou Issoufou et Mohamed Bazoum. Cependant, elle semble désormais être confrontée à de nouvelles pressions et menaces avec le régime militaire qui a pris le pouvoir le 26 juillet 2023 après un coup d’Etat. Dans son message, Samira Sabou s’indigne des comportements de « clanisme » et de « déni de droit d’exercer en toute éthique » qu’elle a toujours combattu.

« J’ai été appelé au téléphone par un militaire, dont je ne citerai ni le grade, ni la fonction. Il m’a demandé, entre autres, pourquoi j’ai partagé le message de l’ex-président Bazoum Mohamed ce matin, sur ma page. Selon lui, je ne devais pas procéder ainsi, du moment où j’ai participé à la rencontre [entre le régime militaire] avec la société civile. Ce sont de tels comportements de clanisme et de déni de droit d’exercer en toute éthique que nous avons dénoncé les treize (13) années passées… », écrit-elle.

Cette situation est un rappel poignant des défis auxquels sont confrontés les médias indépendants au Niger. Dans un communiqué, Reporter sans frontières (RSF) avait exprimé ses craintes sur la liberté de presse dans le pays après le coup d’État. Alors que le pays s’efforce de bâtir un meilleur avenir, il est primordial que les voix critiques ne soit pas étouffée, mais plutôt encouragées et respectées.

Pas au bout de son combat

Le 03 janvier 2022, Samira Sabou et le journaliste d’investigation Moussa Aksar, Directeur de publication du journal « L’Evènement », ont été condamné par la justice nigérienne pour avoir relayé un article des experts de Global Initiative – une ONG de lutte contre la criminalité transnationale – sur le trafic de drogue au Niger. Le Tribunal reproche à l’activiste d’avoir parlé de cet article dans une publication sur le réseau social Facebook.

Le 10 juin 2020, Samira Sabou avait été arrêtée et placée en détention pour « le commentaire d’un internaute jugé diffamatoire » sur l’une de ses publications sur la sulfureuse affaire de détournement de fonds au ministère de la Défense nationale du Niger. Sa détention, malgré son état de grossesse, avait été jugée abusive et avait suscité de vives indignations dans l’opinion publique nationale et internationale. Le 28 juillet 2020, elle a été acquittée pour infraction non constituée.

En 2017, Samira Sabou a été renvoyée de la Direction nationale de la presse du Niger pour avoir parodié l’ancien chef de l’Etat, Mahamadou Issoufou, dans une photo publiée sur les réseaux sociaux (voir photo ci-dessous). Un limogeage jugé abusif par les associations de professionnels de la presse nigérienne.