Le Niger et ses partenaires : Échecs et réussites d’une chancellerie à l’autre

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Cérémonie de pose de la première pierre le 16 avril 2019 par l’ambassadeur Eric P Whitaker

La Direction de la Surveillance du Territoire (DST) de la police nigérienne a inauguré le 15 septembre 2020, son nouveau siège. C’est en ce lieu, que l’ambassadeur des États-Unis au Niger, Eric P Whitaker, posait la première pierre. C’était le16 avril 2019. Fruit de la coopération entre l’État du Niger et les États-Unis d’Amérique, cet édifice qui a coûté 2,9 millions de dollars US, a été financé par le Bureau international de lutte contre la drogue et de l’application des lois (INL) du Département d’État Américain à travers le projet Haské DST « Renforcer les capacités  de la Police aux Frontières du Niger, au niveau central ».

« Ce nouveau siège permettra à la DST de remplir plus efficacement et dans les meilleures conditions ses missions », a expliqué ce jour là, le ministre de l’Intérieur, de la sécurité publique, de la décentralisation et des affaires coutumières et religieuses, Alkache Alhada. Intervenant à son tour, Dr J. Peter Pham, envoyé spécial des États-Unis pour le Sahel, soutient que « le but de leur engagement  diplomatique  au Sahel est d’aider les gouvernements à lutter contre les facteurs de l’insécurité, à contenir la propagation de la violence et à promouvoir  la bonne gouvernance en vue d’aider  à stabiliser la région ».

Nouveau siège de la police des frontière – Niger / Ph : IOM/Daniel Kisito Kouawo

Comme on le constate, le partenaire a respecté et le budget et le calendrier. Ce qui est à son honneur. Le bâtiment est parfaitement fonctionnel. Les nigériens peuvent  donc applaudir de deux mains cette fructueuse coopération. Il est donc possible dans ce pays de construire un bâtiment administratif sans que l’argent ne suive une autre destination, sans que les années passent et que rien ne sort des sables de ce pays sahélien. 

C’est pourquoi, l’on peut s’interroger cet autre immeuble de cinq (5) niveaux en construction devant abriter les sièges des sociétés minières. Le 26 mai 2014, Luc Oursel, président d’Areva, et Omar Hamidou Tchiana, Ministre d’État chargé des Mines et du développement industriel du Niger, signaient un accord stratégique par lequel Areva s’engageait à construire un immeuble à Niamey pour 6,5 milliards de francs cfa (10 millions d’euros) qui sera propriété de l’État nigérien et destiné à héberger les sièges des sociétés minières.

En janvier 2016, le président Issoufou en compagnie du président de l’Assemblée nationale, du Premier ministre, Brigi Rafini, des députés nationaux, des membres du Gouvernement, et un parterre d’invités, procédait en grande pompe à la pose de la première pierre des travaux de construction cet immeuble conçu par l’architecte Sani Sabo et confié à l’entreprise SATOM sous la supervision technique du Cabinet Groupement d’ingénierie (GNI). Ce jour là, le président Issoufou de saluer l’accord signé avec Areva qui prévoit une contribution à la réhabilitation de la route Tahoua Arlit, mais aussi  contribution à la mise en valeur du projet Irhazer et la « nigérisation » des directions générales des sociétés minières.

Pose de la première pierre de l’immeuble « Uranium SA » en janvier 2016, par le président Issoufou

Voilà pour l’histoire. Six ans plus tard le bâtiment qui devrait être livré en août 2018, ne l’est toujours pas. A comparer avec celui de la DST, l’on doit s’interroger où sont passés les fonds ? Les explications officielles sont les suivantes :

Le 19 Novembre 2018, coup de théâtre. Dans un tweet, le ministre Omar Hamidou Tchiana, alors opposant, demande  au Premier Ministre, Brigi Rafini, de « dire au peuple nigérien où sont passés les 100 millions d’AREVA pour la réhabilitation de la route Tahoua-Arlit dans le cadre de l’Accord de partenariat stratégique signé en 2014 ». Après cette dénonciation venant de celui qui a lui-même signé le partenariat, beaucoup d’eau a coulé sous le pont. Ni la  réhabilitation de la route Tahoua-Arlit, ni la mise en valeur du projet Irhazer encore moins l’immeuble n’ont été réceptionnés. 

Une vue de l’immeuble qui tarde à être réceptionné

Luc Oursel est mort d’un cancer. Le président Issoufou est à la fin de son dernier mandat à la tête d’un pays qui meurt aussi des métastases du cancer de la corruption. Les français ne sont pas à blâmer, ils payent une fois, ils payent deux fois en recapitalisant Areva qui devient Orano. Les victimes sont les contribuables nigériens et français. Il est pratiquement impossible que les représentants de l’Ambassade de France ne le sachent pas. Faut-il leur montrer la route qui mène de l’Ambassade à « l’immeuble Uranium SA » pour les convaincre d’ouvrir une enquête en France ? S’agit-il de détournements de fonds entre personnes consentantes ? Les questions sont là.