Sahel : alerte sur une saison pluvieuse précoce et relativement longue (communiqué)

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(Image d'illustration) Inondations au Niger

Dans un communiqué rendu public le 25 avril 2022, le Forum 2022 des Prévisions saisonnières des caractéristiques agro-hydro-climatiques de la saison des pluies pour les zones soudanienne et sahélienne (PRSEASS, 2022) a alerté sur une saison des pluies globalement humide avec, en moyenne, des avec des dates de démarrage précoces, des dates de fin tardives. Le PRSEASS 2022 a également alerté sur des séquences sèches courtes dans la partie sahélienne Ouest, longues dans la partie Est et des écoulements globalement excédentaires dans les principaux bassins fluviaux. Lire l’intégralité du communiqué.

Le PRESASS 2022 a été organisé par le Centre Régional AGRHYMET du CILSS, l’ACMAD, les services nationaux de météorologie et d’hydrologie (SNMH), avec la collaboration de l’OMM et des Organismes des Grands Bassins fluviaux.

Synthèses des prévisions

Les prévisions saisonnières sont basées sur l’analyse de la situation actuelle, des évolutions probables des Températures de Surfaces des Océans (TSO), des modèles statistiques issues des données des SNMH, des connaissances des experts sur les caractéristiques du climat dans la région et des prévisions des centres mondiaux. Le consensus issu de cette analyse a permis d’établir les prévisions ci-après, par rapport à la valeur moyenne de chaque paramètre sur la référence climatologique 1991–2020. 

  • Des quantités de pluies moyennes à excédentaires sur la période Mai-Juin-Juillet, dans la majeure partie de la bande sahélienne allant du Tchad à la côte Sénégalo-mauritanienne et aux îles du Cabo verde, moyennes à déficitaires dans les zones littorales du Sud Sierra Leone, du Liberia et du Sud-ouest de la Côte d’Ivoire et déficitaires à moyennes sur le Sud-est du Nigéria élargi au Sud-ouest Cameroun. En Juillet-Août-Septembre, il est attendu des précipitations excédentaires à moyennes sur la même bande sahélienne et moyennes à déficitaires sur le Sud-est Nigéria.
  • Des dates de début de saison précoces à moyennes sur la zone sahélo-soudanienne couvrant le Sénégal, la Gambie, la Guinée-Bissau, la Guinée, la Sierra Leone, le Burkina Faso, quelques îles du Cabo verde, les parties Sud de la Mauritanie, du Mali, le Sud-ouest du Niger, les parties Nord de la Côte d’Ivoire, du Ghana, du Togo, du Benin, du Nigeria et le Centre du Tchad,
  • Des dates de fin de saison tardives à moyennes sur la bande sahélienne allant des iles du Cape-Vert, au Tchad en passant par le Sénégal, la Gambie, la Guinée-Bissau, la Guinée, le Burkina Faso, les parties Sud de la Mauritanie, du Mali, du Niger, du Tchad et les parties Nord des pays du Golfe de Guinée (Sierra Leone, Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Benin et Nigeria),
  • Des durées de séquences sèches plus courtes à moyennes en début de saison sur les bandes soudanienne et sahélienne de l’Afrique de l’Ouest et du Tchad, sauf sur le Sud-Ouest du Niger, le Nord-est du Benin et le Nord-ouest du Nigeria où des séquences sèches moyennes à longues sont prévues. Vers la fin de la saison, les séquences sèches seraient également plus courtes à normales sur la moitié Ouest de bande soudano-sahélienne et normales à longues sur la moitié Est,
  • Des écoulements globalement équivalents à supérieurs à la moyenne de la période 1991-2020 sont attendus sur les bassins fluviaux de la zone sahélo-soudanienne, en dehors des bassins du Niger Inférieur, du Logone, de l’Ouémé et du Cavally. En effet, il est attendu que les écoulements soient : i) supérieurs à la moyenne dans le Delta Intérieur (au Mali) et le bassin moyen du fleuve Niger, la Komadougou Yobé et les hauts bassins du Chari et de la Volta (Burkina Faso), ii) moyens à excédentaires dans les bassins du Sénégal, de la Gambie, de la Comoé, de la Bandama (Côte d’Ivoire), du Mono (Togo et Bénin), de la Volta Inférieure (Ghana) et la partie aval du Chari-Logone, iii) moyens dans le bassin du Sassandra en Côte d’Ivoire, le haut bassin du fleuve Niger (en Guinée et au Mali) et iv) inférieurs à la moyenne dans les bassins du Niger Inférieur intégrant la Bénoué, du Logone (Tchad), de l’Ouémé (Bénin) et du Cavally (Côte d’Ivoire).

Recommandations

1. Face au risque d’inondation

Le caractère globalement pluvieux, attendu pour la saison des pluies 2022 dans les zones soudanienne et sahélienne de l’Afrique de l’Ouest et du Tchad, présage des risques élevés d’inondations pouvant entrainer des pertes de récoltes, de biens matériels et en vies animales et humaines dans les localités exposées. Pour y faire face, il est recommandé de :

  • renforcer la communication des prévisions saisonnières et de leurs mises à jour afin d’informer, sensibiliser les communautés sur les risques et créer les conditions de leur mise à l’abri, à travers notamment l’appui de la presse, des plateformes de réduction des risques de catastrophes, des ONG et des SAP des pays ;
  • renforcer la veille et les capacités d’intervention des agences en charge du suivi des inondations, de la réduction des risques de catastrophes et des aides humanitaires ;
  • éviter l’occupation anarchique des zones inondables par les habitations et les cultures ;
  • renforcer les digues de protection et assurer la maintenance des barrages et des infrastructures routières ;
  • curer les caniveaux pour faciliter l’évacuation des eaux de pluies ;
  • suivre de près les seuils d’alerte dans les sites à haut risque d’inondation, notamment dans les zones du Delta Intérieur (au Mali) et du bassin moyen du fleuve Niger, de la Komadougou Yobé et des hauts bassins du Chari et de la Volta ;
  • Prévoir des sites d’accueil pour les populations exposées au sinistre ;
  • favoriser la culture des plantes adaptées à la persistance des situations d’excès d’eau dans le sol ;
  • maintenir la garde et suivre les mises à jour de ces prévisions saisonnières et les prévisions de courtes et moyennes échéances que produisent et diffusent les services météorologiques et hydrologiques des pays.

2. Face au risque de maladies

Les zones humides et celles inondées peuvent être favorables au développement des germes de maladies (Choléra, malaria, dengue, bilharziose, etc). Aussi, les séquences sèches moyennes à longues attendues notamment dans certaines parties du Sahel Est, pourraient occasionner une persistance de hautes températures et des vents de poussières favorables à la prolifération d’autres germes de maladies épidémiques. A cet effet, il est recommandé de :

  • sensibiliser et diffuser des informations d’alerte sur les maladies à germes climato-sensibles, en collaboration avec les services de météorologie et de santé ;
  • renforcer les capacités des systèmes nationaux de santé et des plateformes nationales de réduction de risques de catastrophes ;
  • assainir les aglomérations et eviter le contact avec les eaux contaminées, à travers des opérations de drainage et de curage des caniveaux ;
  • prévenir les maladies, en vaccinant les populations et les animaux ;
  • appuyer la lutte contre les piqures de moustiques en facilitant l’accès aux moustiquaires, aux antipaludéens et aux produits de traitement anti-moustiques ;
  • prévenir les épizooties à germes préférant de bonnes conditions humides ;
  • renforcer la vigilance contre les maladies et les ravageurs des cultures (chénille légionnaire et autres insectes nuisibles).

3. Face au risque de sécheresse

En dépit de caractère globalement humide attendu de la saison des pluies 2022, il n’est pas exclu d’observer des séquences sèches relativement longues pouvant entrainer des déficits hydriques, notamment dans certaines localités de la bande sahélienne. Pour atténuer les risques sur la croissance des cultures et des plantes fourragères, il est recommandé de :

  • choisir les espèces et variétés de cultures tolérantes au déficit hydrique, dans les zones exposées ;
  • adopter des techniques culturales de conservation des sols et de l’eau ;
  • diversifier les pratiques agricoles, à travers la promotion de l’irrigation et du maraichage pour réduire le risque de baisse de production ;
  • prévenir la prolifération de la chenille mineuse de l’épi du mil ;
  • assurer une gestion rationnelle des ressources en eau de surface pour satisfaire les différents usages, notamment dans les bassins du Niger Inférieur, du Logone, de l’Ouémé et du Cavally où les écoulements seraient moyens à déficitaires ;
  • interagir avec les techniciens de la Météorologie Nationale, de l’Agriculture et de l’Hydrologie pour des informations spécifiques et les conduites à tenir.

4. Recommandations pour mieux tirer projet de la saison des pluies

Au regard du caractère globalement humide attendu de la saison des pluies 2022 dans les zones soudanienne et sahélienne de l’Afrique de l’Ouest du Tchad, il est recommandé aux agriculteurs, éleveurs, gestionnaires des ressources en eau, Projets, ONG et aux autorités de :

  • investir davantage dans les cultures à hauts rendements tolérantes vis-à-vis des conditions humides (riz, canne à sucre, tubercules, etc.) ;
  • valoriser les situations d’écoulements moyens à excédentaires, en développant des cultures irriguées, notamment dans les plaines inondables des bassins du Sénégal, de la Gambie, de la Comoé, de la Bandama, du Mono, de la Volta Inférieure, du Sassandra, de la partie aval du Chari-Logone et du haut bassin du fleuve Niger (tout en veillant sur les risques d’inondation par endroit) ;
  • mettre en place des dispositifs de collecte et de conservation d’eau de ruissellement pour des usages agricoles et domestiques en saison sèche ;
  • soutenir le déploiement de techniques climato-intelligentes d’augmentation des rendements des cultures et des fourrages, face aux risques climatiques, notamment ceux liés aux excès d’eau de pluies et à la sécheresse ;
  • renforcer les dispositifs d’information, d’encadrement et d’assistance agro-hydro-météorologiques des producteurs ;
  • faciliter aux producteurs l’accès à des semences améliorées et des intrants agricoles adaptés à leurs besoins ;
  • sécuriser les revenus et alléger les pertes agricoles à travers la promotion et la souscription à des assurances agricoles indicielles.

Compte tenu de la situation de crise alimentaire et nutritionnelle assez critique qui prévaut actuellement dans la sous-région, la mise en œuvre scrupuleuse de ces dispositions pourrait contribuer à alléger les difficultés auxquelles font face les populations vulnérables, à l’issue de la saison.

Il est recommandé aux acteurs et utilisateurs des différents secteurs d’être attentifs aux mises à jour qui seront faits par le Centre Régional AGRHYMET, l’ACMAD et les services météorologiques et hydrologiques nationaux, tout au long de la saison.

Fait à Abuja le 25 avril 2022