Ouverture du procès Thomas Sankara : le Burkina Faso a rendez-vous avec son histoire

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Le président du Burkina Faso Thomas Sankara lors d'un discours le 5 octobre 1983 à Paris, France. Crédit photo : Alain MINGAM/GAMMA-RAPHO

Ouverture du procès Thomas Sankara ce 11 octobre. Après des décennies d’attente, le Burkina Faso a enfin l’occasion de regarder son histoire en face en brisant un tabou d’État sur les circonstances, mais surtout, les responsables de l’assassinat du père de la nation Burkinabè. À quel point l’absence de Blaise Compaoré pèsera-t-elle sur le procès ?

Longtemps attendu, le procès Thomas Sankara s’ouvre ce lundi 11 octobre. « Enfin ! », dit la famille de l’ancien président burkinabè, « Enfin ! » répond en cœur la nation burkinabè, laissée orpheline et divisée après l’assassinat de Thomas Sankara, le 15 octobre 1987.

Il sera resté quatre ans à la tête du Burkina Faso, après le coup d’État de 1983. Plus que la perte d’un pays, la mort de Thomas Sankara est un traumatisme continental. Visionnaire, Thomas Sankara était épris de justice sociale. Il était avant l’heure, une figure féministe, écologiste et anti-impérialiste.

Les parties civiles se sont battues contre un mirage pour que la justice se saisisse de la question, 34 ans après les faits et mette expressément en accusation Blaise Compaoré, commanditaire présumé. Toujours reclus en Côte d’Ivoire, sa terre d’exil depuis le soulèvement populaire de 2014 qui l’a chassé du pouvoir, l’ancien président et frère d’armes de Thomas Sankara est le grand absent de ce procès. Le poids de son absence est une des grandes inconnues de ce rendez-vous judiciaire.

Le 15 octobre 1987 disparaissaient également 12 collaborateurs de Thomas Sankara. Une soixantaine de témoins seront entendus à la barre devant 14 accusés dont deux absents : outre Blaise Compaoré, Hyacinthe Kafando, soupçonné d’avoir dirigé le commando d’exécution de Thomas Sankara, mais évanoui dans la nature depuis 2015. Tous deux seront jugés par contumace devant un Tribunal militaire. Bien que compétent compte tenu du statut militaire des accusés au moment des faits, certaines parties civiles doutent que la vérité puisse sortir d’une juridiction d’exception, surtout celle de la « Grande muette ».

La France n’ayant toujours pas, malgré les engagements pris par Emmanuel Macron, déclassifié les archives réclamées par la justice burkinabè, le procès n’explorera pas la piste de la responsabilité de Paris, ou plus largement, du complot international impliquant potentiellement, outre la France, la Côte d’Ivoire et la Libye.

Avec Teria News