Niger : graves irrégularités dans la recharge et la vente de gaz, plusieurs points de distribution fermés

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Le 21 octobre 2022, le directeur général de l’Autorité de régulation du secteur de l’énergie (ARSE), Ibrahim Nomao, a animé un point de presse relativement à la cherté du gaz au Niger. Il a donné les raisons de la hausse irrégulière du prix de gaz, mais également des mesures prises face à la situation.

Dans cette sorte médiatique, le DG de l’ARSE a exposé plusieurs irrégularités constatées au niveau des centres emplisseurs et des points de vente en détail qui ont considérablement impacté sur le prix du gaz. Ces irrégularités ont été relevées à la suite d’une inspection inopinée de l’ARSE le 17 octobre 2022 dans plusieurs centres emplisseurs et points de vente en détails.

« Au niveau de la SORAZ (société de raffinerie de Zinder – ndlr), la bouteille de 12,5kg est vendue à 1 500 francs CFA. Mais, comme c’est la SONIDEP (Société nigérienne du pétrole) qui achète le gaz pour remettre aux centres emplisseurs, il a été décidé que la SONIDEP prenne 100 francs CFA. Ce qui fait 1 600 francs. Les interventions des centres emplisseurs (le transport, la marge bénéficiaire, la perte qu’ils peuvent subir) ont été calculés à 1 775 francs CFA. C’est-à-dire qu’au niveau des centres emplisseurs, s’ils devaient amener le gaz au dépositaire, ils devraient le vendre à 3 500 francs. Le dépositaire, lui, a une marge bénéficiaire de 250 francs. Ce qui fait au total 3 750 francs. Donc, la bouteille de 12,5 kg devrait se vendre à 3 750 francs, mais contre toute attente, fait-il constater, les gens la vendent à 4 000, à 5 000 et à 6 000 francs », a expliqué Ibrahim Nomao.

En dehors de cette augmentation inexplicable du prix du gaz au niveau de ces revendeurs, l’ARSE a également relevé des irrégularités relatives au volume du contenu de la bouteille. En effet, les inspections menées par l’institution ont permis de constater une diminution du volume du contenu de la bouteille au niveau des centres emplisseurs, mais aussi au niveau des détaillants. Selon Ibrahim Nomao, quand les contrôleurs de l’ARSE ont pesé les bouteilles au niveau de certains centres emplisseurs, il a été constaté le non-respect du poids normal du gaz. « Au niveau de certains centres emplisseurs que le gap au niveau du poids varie entre moins 2 kg et moins 5 kg », a indiqué le directeur général de l’ARSE. Ce qui veut dire que non seulement les bouteilles ne sont pas remplies, mais aussi, elles ne sont pas vendues au prix normal.

Face à ces manquements qui pèsent fortement sur le pouvoir d’achat des populations, l’ARSE a imposé des sanctions aux centres emplisseurs et points de vente, allant des amendes pour certains et la fermeture pour d’autres. D’autres auteurs de ces manquements ont été doublement sanctionnés. « Nous avons commencé par les centres emplisseurs. Sur 7 centres emplisseurs visités, il y a trois qui ont été fermés et 4 ont été amendés, mais non fermés. Certains ont été amendés et fermés », a fait savoir Ibrahim Nomao.

L’ARSE attaquée en justice

Réagissant aux sanctions qui lui ont été infligées, une société de commercialisation du gaz a décidé de saisir la justice pour attaquer l’ARSE. Il s’agit de la société ORIBA GAZ dont les avocats estiment que les inspections de l’ARSE ne sont qu’une campagne orchestrée « pour discréditer certains opérateurs du secteur [de gaz] au profit d’autres concurrents ». « Nous avons été mandatés par la société ORIBA GAZ pour engager une procédure contre l’Autorité de Régulation du Secteur de l’Energie en raison des manquements graves, préjudiciables à ses intérêts professionnels et commerciaux », a notifié, au DG de l’ARSE, un groupe d’avocats associés pour la défense de la société.

« ORIBA GAZ est, en effet, contrainte de saisir les juridictions compétentes afin que la responsabilité de l’ARSE soit établie, constatée et déclarée en raison de la faute commise par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions, consistant en une voie de fait, un abus de pouvoir suivi d’une campagne médiatique de dénigrement systématique de ses produits », indiquent les avocats dans une lettre consultée par l’Evenement-Niger.  

Les avocats engagés pour la défense de la société ont expliqué que l’ARSE n’a pas respecté les procédures de contrôle et de prononciation des sanctions à l’encontre des opérateurs. « Aussitôt arrivés sur les lieux, et sans mise en demeure ni sommation préalable, les agents ont procédé, manu militari, à la fermeture du centre emplisseur puis ils ont infligé une amende de 10.000.000 F CFA à la société ORIBA GAZ », indiquent les avocats qui affirment que la société n’a été préalablement invitée à présenter des observations sur les griefs articulés, tel que prévu par la loi.

Les avocats de la société ORIBA GAZ ont également évoqué la violation des consignes de sécurité par les agents de l’ARSE lors de la fermeture du centre. Ils ont fait savoir que « les techniciens se sont vus refuser l’accès pour refroidir les cuves et contrôler les éventuelles fuites de gaz ». Ce qui, selon eux, met en danger les installations, les travailleurs et les populations environnantes.