Paris-Alger : encore et toujours des réparties sur un fond colonial

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Paris-Alger : encore et toujours des réparties sur un fond colonial

Empêtrée dans une crise diplomatique au Sahel, la France d’Emmanuel Macron crée un nouveau foyer de tension au Maghreb. La sortie du chef de l’État français le 30 septembre dernier sur l’Algérie fait resurgir un intermittent passé colonial tumultueux.

En Algérie, la tension est montée d’un cran. Dans la foulée des condamnations tous azimuts de la classe politique algérienne suite aux critiques du chef de l’Etat français, le pays a rappelé son ambassadeur en poste à Paris et interdit son espace aérien aux forces Barkhane. Cette opération qui, depuis que la Russie s’est invitée avec force et fracas au Sahel, bat sérieusement de l’aile.

Tout a commencé avec les propos tenus par Emmanuel Macron devant les jeunes algériens issus de l’immigration.  « Je ne parle pas de la société algérienne dans ses profondeurs, mais du système politico-militaire qui s’est construit sur (…) la rente mémorielle. On voit que le système algérien est fatigué, le Hirak l’a fragilisé », a déclaré le Chef de l’État français. Il a enfoncé le clou : « J’ai un bon dialogue avec le président Tebboune, mais je vois qu’il est pris dans un système qui est très dur ».

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Le président français ne s’en est pas arrêté là. « Je suis fasciné de voir la capacité qu’a la Turquie à faire totalement oublier le rôle qu’elle a joué en Algérie et la domination qu’elle a exercée. Et d’expliquer qu’on est les seuls colonisateurs, c’est génial. Les Algériens y croient », a-t-il dégainé. Mais Alger ne s’est pas fait attendre. « Les innombrables crimes de la France coloniale et le génocide contre le peuple algérien – qui n’est pas reconnu par la France – ne peuvent faire l’objet de manœuvres offensantes », a réagi le gouvernement algérien dans un communiqué.

Cette malencontreuse intervention a poursuivi le communiqué « heurte fondamentalement les principes devant présider à une éventuelle coopération algéro-française en matière de mémoire ». « Rien ni personne ne peut absoudre les puissances coloniales de leurs crimes, y compris les massacres du 17 octobre à Paris dont l’Algérie et sa communauté établie en France s’apprêtent à commémorer dans la dignité », a souligné l’Etat algérien.

Aussi dans les milieux religieux, Emmanuel Macron a été la cible de critiques acerbes. « Un président qui ignore l’histoire, arrogant, qui humilie le président algérien et rentre dans une confrontation inédite avec l’ensemble du système politique [algérien] », a fustigé Abderreza Makri, président du Mouvement pour la société de la paix (MSP) proche des Frères musulmans. D’autres dans la classe politique algérienne ont vu dans cette déclaration de Macron un calcul politique sur fond de pré-campagne électoral.

Le paradoxe Macron

Cette sortie du président français semble aux antipodes de celle qu’il a faite lors de sa campagne électorale en février 2017 lors d’une visite à Alger. « La colonisation fait partie de l’histoire française (…). C’est un crime, c’est un crime contre l’humanité, c’est une vraie barbarie. Et ça fait partie de ce passé que nous devons regarder en face, en présentant nos excuses à l’égard de celles et ceux envers lesquels nous avons commis ces gestes », avait-il reconnu.

« Je dis la reconnaissance par la France des souffrances endurées et rends hommage aux victimes algériennes et européennes de Sétif, de Guelma et de Kherrata », avait inscrit Macron dans le livre d’or qu’il a signé lors de son séjour algérien de 2017. Tout en voulant épargner le président algérien avec qui il entretient de bonnes relations et en se mettant à dos le « système politico-militaire », Emmanuel Macron révèle son côté ambivalent dans le dossier algérien. Il ravive un vieux contentieux colonial.