Le rapport de la mission d’investigation, de vérification et d’établissement des faits de la Commission nationale des Droits humains (CNDH) sur la disparition de 102 personnes dans la zone d’Inatés (région de Tillabéry) pointe du doigt certains éléments de la Force armée nigérienne, comme auteurs des exécutions extrajudiciaires sur des civils non armés. La mission a découvert physiquement 6 fosses communes dans les villages de Tagabat, Ikirbachane, Bambakariane, et Tagarbet.
Selon Abdoulaye Seydou, Président du Réseau Panafricain pour la Paix, la Démocratie et le Développement (REPPAD) et membre de la mission, « à la lumière des témoignages, des rapports d’expertise médicolégale et des rapports dressés par les officiers de police judicaires, la mission a conclu qu’il y a eu des exactions et des exécutions sommaires d’au moins 71 personnes civiles non armés ». « Il ne s’agit nullement pour la Commission nationale des Droits humains de friser encore moins de porter atteinte au moral des troupes, mais plutôt de continuer d’avantage à leur encrage éthique et surtout au respect du droit international humanitaire et des droit de l’homme en tout temps et en tout lieu », a-t-il indiqué.
Pour le Commissaire aux Droits humains de la CNDH, aucune des 102 personnes disparues n’est en détention. « On est formelle et on l’a vérifié. Il n’y a aucune personne parmi les 102 figurant sur la liste [établie par les autorités administratives et coutumières d’Inatés] qui serait détenue au service central de lutte contre le terrorisme ou dans une quelconque prison de pays-là », a-t-il précisé. Une précision qui va certainement anéantir les espoirs que nourrissent certaines familles de retrouver leurs proches interpellés par l’armée nigérienne en fin mars 2020.
Le Gouvernement nigérien désavoué par le rapport du CNDH
Le 27 mai 2020, le Professeur Issoufou Katambé, ministre nigérien de la Défense nationale, avait officiellement démenti l’information d’une supposée « exécution extrajudiciaire des civils dans la région de Tillabéry » et annonce l’ouverture d’une enquête. « Ce sont des allégations qui ternissent l’image des soldats nigériens », avait-il déclaré. Le rapport de la mission de la CNDH sur cette tuerie vient donc mettre l’Etat nigérien devant ses responsabilités et dément officiellement la version du Gouvernement sur cette affaire.
Rappelons que fin mars 2020, une liste manuscrite portant les noms 102 personnes arrêtées par les militaires de nigériens, a été publiée par la maire d’Inatés, un village, une commune rurale située dans le département d’Ayorou, région de Tillabéri, à l’ouest du Niger près de la frontière avec le Mali. Les différentes communautés avaient accusées l’armée nigérienne, d’avoir exécuté les 102 personnes recherchées par leurs proches.
Ce n’est pas la première fois que les militaires nigériens ont été accusés de tels faits. En avril 2020, l’ONU a documenté 34 exécutions extrajudiciaires commises par l’armée nigérienne sur le territoire malien : à Inekar, 24 victimes ; à Anderamboukane, 5 victimes ; et 5 autres victimes dans une localité située entre Anderamboukane et Chinagodar. Ces lieux sont tous situés dans le nord-est du Mali, proches de la frontière nigérienne.