Des web-activistes jettent des discrédits sur les médias 

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Les activistes Bana Ibrahim et Abdou Pagoui

Les Web-activistes Bana Ibrahim, Hamid Amadou N’Gade et Abdou Pagoui ont tenté de discréditer les médias Aïr Info et la Radio Télévision Nationale RTN. Même s’ils ont des lignes opposées, ces activistes ont un point commun : jeter le discrédit sur des médias qui diffusent des informations qui ne leur plaisent.

Qui sont-ils ?

Bana Ibrahim, militant du parti politique MODEN-FA Lumana Africa, parti opposant du régime déchu de Bazoum Mohamed. Le cyber activiste a une influence sur le réseau social à travers ces publications, des dénonciations. Plus de 120.000 utilisateurs de Facebook le suivent. Sur Twitter (actuel X), il comptabilise plus de 4.000 abonnés.  Bana Ibrahim a ouvertement soutenu le coup d’État militaire ayant renversé Bazoum Mohamed le 26 juillet 2023. 

Abdou Pagoui et Hamid Amadou N’gade, militants du parti politique PNDS-Tarayya, sont des thuriféraires du régime déchu, dont ils encensaient la moindre action. Ils ont respectivement 56.000 et 26.000 abonnés sur le réseau social Facebook. Ils ont condamné le coup d’État militaire et ont soutenu les sanctions de la CEDEAO après le coup d’État infligé au Niger. Ils continuent de se battre sur les réseaux sociaux pour la restauration du Bazoum Mohamed au pouvoir.

Estampe « Fake News » sur le Site Aïr Info 

Le 11 juin 2024, le site d’information Aïr Info a publié un article sur le réseau social Facebook titré « Imouraren annonce le redémarrage de l’un des grands gisements de l’uranium » au Niger. Cet article a été rédigé sur la base d’un communiqué de l’ORANO en date du 10 juin 2024. C’est un communiqué qui a été publié suite à une mise en demeure adressée par le gouvernement du Niger à l’ORANO.

Le même jour Bana Ibrahim a capturé l’image de l’article sur laquelle il estampille le sceau “FAKE NEWS” et publie sur le réseau social Facebook. Dans sa publication il n’a pas apporté des éléments ou des faits qui démentent l’information publiée.

Réagissant à sa publication, le directeur de publication du journal Aïr Info, Ibrahim Manzo Diallo (DIM), en bon professionnel, a demandé à Bana en commentaire s’il a contacté ORANO avant de démentir l’information. Il lui avait rappelé que le journal Aïr Info ne publie pas des fausses informations avant de lui laisser en pièce jointe le communiqué de la société Imouraren SA. 

La réponse de Bana Ibrahim en commentaire est la suivante « J’ai contacté l’autre partie qui est le gouvernement du Niger qui dément formellement le titre principal de votre article ». Pour vérifier l’information, Bana devrait-il le faire auprès de la société qui affirme avoir repris les travaux ou au niveau du gouvernement nigérien ?

Qu’est-ce qui pourrait motiver les auteurs des « démentis » ? 

La publication par Aïr Infos, le 11 juin 2024, de l’information relative à de la reprise des travaux de la Société Imouraren SA après la mise en demeure de l’Etat du Niger est de nature mettre en échec ou à tout le moins retarder l’option prônée par l’activiste Bana, à savoir le retrait le retrait du permis d’exploitation. Et effectivement, 9 jours après, le gouvernement nigérien a annoncé le 20 juin 2024 le retrait de ce permis, avant de consacrer officiellement cette décision à l’issue du conseil des ministres du 24 juin 2024. Simple coïncidence ?

Plusieurs années aupravant, Il faut dire que Bana Ibrahim a, par le passé, effectué des publications sur Facebook et Twitter s’intéressant à la question minière. Il affiche son opposition à la compagnie d’exploitation minière ORANO qui exploite l’uranium du Niger depuis plus de 50 ans. C’est le cas de l’une de ces publications sur X du 06 mai 2023. 

« La Grande arnaque d’Orano. En 2014, le ministre d’État Omar Hamidou @Tchiana avec AREVA, avait obtenu 76 milliards pour 3 ans et en 2023 pour 17 ans, les actuels négociateurs ont obtenu 26 milliards. On veut savoir quel est le montant exact du bonus à la signature ». Rapporte la publication. 

Une autre publication basée sur l’ironie révèle son côté opposé à l’ORANO et plusieurs entreprises françaises. Celle du 14 Janvier 2020 elle stipule « Areva Orano, Bolloré, Total, Manutention Africaine, SATOM, CFAO. Ce sont des compagnies qui sont au Niger pour assurer notre sécurité, lutter contre le terrorisme, veiller à la stabilité et promouvoir la paix ».

Après les évènements du 26 juillet 2023, les nouvelles autorités du Niger ont suspendu plusieurs accords qui relient le Niger avec la France. Cette dernière refusait de reconnaître les militaires ayant renversé Bazoum Mohamed. 

Aïr Info a également enregistré un autre cas de dénigrement en septembre 2023. Il s’agit de la publication de Hamid Amadou N’gade. Aïr Info avait annoncé à travers sa page Facebook une réunion de la CEDEAO en vue d’alléger les sanctions infligées au Niger suite au coup d’État militaire du 26 juillet 2023 au Niger.

Hamid a publié une capture d’écran de ladite publication avec la mention Fake News. Il soutient sa publication par cette formule : « aucun sommet ni réunion n’est prévu » sans mentionner sa source. Pourtant, des discussions ont eu bel et bien lieu à Abuja, la capitale du Nigeria à cette période.

Cette posture de l’activiste n’est guère surprenante, car à travers plusieurs posts publiés, partagés ou commentés, il n’a jamais fait mystère de son souhait du maintien des sanctions économiques draconiennes contre le Niger et d’une intervention militaire de la CEDEAO en vue de restaurer le président Bazoum au pouvoir.

Haro sur la Radio-Télévision du Niger (RTN)

Hormis Aïr Info, d’autres médias d’informations ont été victimes de dénigrement par des web-activistes. Parmi ceux-ci se trouve la Radiotélévision Nationale (RTN).  Elle a fait l’objet de nombreuses attaques de la part  Abdou Pagoui qui, à plusieurs reprises, a dénigré et mis en cause la crédibilité de ce média. 

En décembre 2023, la RTN a réalisé un reportage sur des contrats faramineux attribués à certains proches de l’ancien président Mohamed Bazoum. Les jours suivants, un communiqué de l’organe gouvernemental d’information explique que ledit reportage « n’est qu’un avant-goût d’une série de reportages contre la corruption et le népotisme révélés sous divers régimes successifs. »

Suite à cela,  Abdou Pagoui a débuté une campagne de dénigrement à l’encontre de la RTN en réagissant systématiquement avec vigueur aux informations fournies par la RTN.  

 Le 23 Mars 2024, il a publié un post dénommé Télé Sahel (RTN) ou Télé « Sa haine ». Dans sa publication Abdou Pagoui, il a déclaré que « depuis la prise du pouvoir par les forces rétrogrades au Niger, la chaîne publique nationale est devenue le bras armé de cette junte à travers des reportages haineux, accusateurs, calomnieux et avilissants envers tous ceux qui de près ou de loin ont occupé des fonctions à responsabilité publique ou envers les opérateurs économiques soigneusement sélectionnés à dessein afin d’établir sans aucune preuve des passe-droits accordés par le Président Bazoum à ces derniers ».

Il l’accuse « de devenir tristement la célèbre Radiotélévision Libre des « Mille Collines » (RTLM) du Rwanda qui a contribué au génocide de 800 000 morts tutsis ». « Il est intolérable que la RTN devienne “la voix qui fasse la promotion de la mort” en direct » a-t-il ajouté. 

Des web-activistes en posture de propagande 

Dans un entretien qu’il nous a accordé, le directeur de publication du journal Aïr Info Diallo Ibrahim Manzo (DIM) a révélé que son organe a fait face depuis les évènements du 26 juillet 2023 à des invectives de la part des web-activistes. « Tout celui qui écrit l’inverse de ce qu’ils disent il est contre eux et contre le régime. Donc c’est un problème de lisibilité de l’information. »

« Pour eux, l’information doit être unilatéral, ce qui n’est pas bien parce que le droit à l’information du public insiste beaucoup sur l’équilibre de l’information.  Nous avons beaucoup de responsabilité sur ça et nous ferons tout pour que cette responsabilité soit partagée et respectée surtout » a-t-il témoigné.

Avant l’avènement du CNSP Aïr Info n’enregistre pas des réactions pareilles.  « Bien qu’un organe ou un journal ne peut pas être apprécié à 100% mais on n’avait pas cette chape de plomb sur nous, ces menaces, ces insultes » a déclaré DIM.  « Pour eux, nous sommes des traitres, nous ne faisons rien pour que la patrie survive, donc voilà le problème » a-t-il déploré.

La marque de fabrique des web activistes 

Une constance : les web-activistes dont nous avons revisité certaines de leurs publications ne rectifient jamais une information qu’ils ont publiée et qui s’est révélée erronée. Ce qui donne des indications sur les motivations et les objectifs poursuivis à travers leurs publications.

Le fait qu’ils revendiquent eux-mêmes le titre « Influenceurs » résume leur état d’esprit et l’usage qu’ils font des réseaux sociaux. Influencer ne passe pas forcément par la vérité, mais la présentation des faits tronqués ou la manipulation de l’information. Influencer c’est aussi manipuler les consciences pour amener les gens à accepter une situation ou à agir dans un sens donné.

En outre, ces web-activistes font fi du principe sacrosaint de la vérification de l’information, de son équilibre et de la recherche du contradictoire. Ils ne contactent pas les parties qu’ils mettent en cause pour obtenir leur version. Ce qui constitue un « procès sans appel », une mise à mort certaine. Leur objectif à travers les publications n’est pas d’informer, mais de manipuler l’information dans un seul sens.

Abarchi Tcherno Madjo 

Cette enquête a été réalisée dans le cadre du projet « Révéler la vérité grâce à OSINT » mis en œuvre par le journal « L’Evènement » en collaboration avec le Centre pour l’Innovation du Journalisme et le Développement (CJID) et OSF Africa.

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