Les Nations Unies ont alerté, mardi, sur le sort des marins toujours bloqués en mer à cause de la pandémie de Covid-19. C’est une autre facette souvent méconnue de la crise sanitaire du nouveau coronavirus. Des centaines de milliers de marins à travers le monde sont immobilisés en mer à des milliers de kilomètres de chez eux.
A l’échelle mondiale, quelque 400.000 marins sont actuellement dans l’impossibilité de débarquer à la fin du voyage qui leur a été assigné en raison des mesures de confinement liées à la pandémie, et autant de personnes attendent à terre de pouvoir les remplacer, ont rappelé le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), le Pacte mondial des Nations Unies et le Groupe de travail de l’ONU sur les entreprises et les droits de l’homme. Dans une déclaration commune appelant à « atténuer la crise de la Covid-19 en mer », ces trois entités onusiennes regrettent que des marins soient empêchés de débarquer ou de retourner sur leurs navires.
Cette situation empêche les professionnels du secteur maritime de gagner leur vie ou de rentrer chez eux en raison des restrictions imposées par la pandémie en matière de voyage et de transit. Cette « crise cachée » touche des centaines de milliers de membres d’équipage de navires et d’autres travailleurs bloqués en mer depuis de nombreux mois. Selon l’ONU, des personnes ont été bloquées dans certains cas, sur le même navire pendant 17 mois ou plus, soit bien plus que les 11 mois maximums autorisés par les normes internationales du travail.
Situation similaire dans l’industrie de la pêche et sur les plateformes pétrolières et gazières
Outre les personnes travaillant sur les porte-conteneurs et autres navires commerciaux essentiels à la chaîne d’approvisionnement mondiale, sont également touchés les personnes travaillant dans l’industrie de la pêche et sur les plateformes pétrolières et gazières offshore. Pour l’ONU, ces conditions ont un impact profondément négatif sur leurs droits fondamentaux, notamment le droit à la santé physique et mentale, le droit à la liberté de mouvement et le droit à la vie familiale.
Dans leur déclaration commune, les trois entités onusiennes appellent par ailleurs les entreprises concernées à identifier l’impact de la pandémie, et de la réponse des gouvernements à celle-ci, sur les droits humains des marins et à utiliser « activement leur influence pour atténuer ces impacts autant que possible ».
Le HCDH, le Pacte mondial et le Groupe de travail encouragent les entreprises à exhorter les gouvernements à mettre en œuvre des protocoles et les mesures élaborés par les agences des Nations Unies pour permettre le changement d’équipage en toute sécurité. Dans ce dispositif, les associations et les syndicats de du secteur doivent également être associés, estiment les trois entités onusiennes afin qu’ils exercent ensemble une pression collective.
Au début du mois de septembre, le Directeur général de l’Organisation internationale du travail (OIT), Guy Ryder, avait déjà fait part de son inquiétude concernant la situation des marins. « Beaucoup ont été et continuent d’être bloqués à bord depuis des mois, certains depuis plus d’un an. Ils sont stressés et épuisés. Parallèlement, de nouveaux équipages sont prêts à les remplacer mais ne peuvent pas le faire », avait affirmé M. Ryder.
Un appel aux gouvernements et au secteur des transports maritimes
D’autres entités onusiennes dont l’Organisation maritime internationale (OMI) et des organismes tels que la Fédération internationale des travailleurs des transports et la Chambre internationale de la marine marchande ont également tenté d’attirer l’attention sur ce problème. Ils ont proposé des solutions, notamment la nécessité d’accorder aux membres d’équipage le statut de « travailleur clé ». Toutefois, les mesures gouvernementales anti-Covid continuent d’affecter directement la capacité des exploitants de navires à effectuer les changements d’équipage de routine et nécessaires ou à accorder des congés à terre.
C’est pourquoi, le HCDH, le Pacte mondial et le Groupe de travail estiment que la responsabilité de respecter les droits des marins ne se limite pas aux gouvernements et au secteur des transports maritimes mais qu’elle s’étend également aux milliers d’entreprises commerciales qui utilisent les services de transport maritime de marchandises. Ces derniers représentent près de 90 % du commerce mondial.
Pour mettre fin à cette « situation intolérable », les entités onusiennes demandent aux entreprises multinationales et aux marques mondiales, ainsi qu’aux institutions financières, d’évaluer et d’agir pour remédier à la situation des marins dans le contexte de la pandémie, quelle que soit la place qu’elles occupent dans la « chaîne de valeur ».
ONU Info