La Cour suprême a validé la condamnation du journaliste Ignace Sossou, détenu arbitrairement pendant six mois l’année dernière au Bénin. Reporters sans frontières (RSF) dénonce une décision grave et sans précédent, et soutiendra les recours du journaliste devant des juridictions régionales ou internationales.
La Cour suprême, qui devait examiner vendredi 23 juillet la décision rendue par la Cour d’appel de Cotonou du 19 mai 2020 ayant valu au journaliste Ignace Sossou un séjour en prison de six mois, a tranché. Selon les juges, les lois de la République ont bien été appliquées en condamnant le journaliste pour harcèlement.
Le journaliste de Bénin Web TV avait été condamné en appel l’année dernière à 12 mois de prison dont six mois ferme pour “harcèlement par le biais de moyens de communication électronique” après avoir relayé sur les réseaux sociaux les propos d’un procureur tenus au cours d’un atelier de travail sur la désinformation. Il n’avait pourtant commis aucune faute, comme l’avait très bien montré une vidéo de RSF juxtaposant les déclarations du procureur et les trois tweets du journaliste, reprenant quasiment mot pour mot les propos du magistrat.
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Contacté par notre organisation, le journaliste a déploré une nouvelle décision qui “sonne comme une démission des juges béninois d’assurer l’indépendance de la justice vis-à-vis du pouvoir politique”. Il a prévu d’introduire un nouveau recours devant la cour de justice de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
“Cette décision représente un recul inédit et sans précédent pour la liberté d’information au Bénin, déclare Assane Diagne, directeur du bureau Afrique de l’Ouest de RSF. En se basant sur le Code du numérique pour sanctionner un journaliste qui n’avait rien à se reprocher, la justice béninoise a contourné le droit de la presse et a rendu une décision contraire aux standards internationaux. RSF se tiendra aux côtés d’Ignace Sossou pour utiliser tous les moyens juridiques possibles afin que cette condamnation soit annulée. Nous exhortons également l’Etat à revenir sur le Code du numérique et à le mettre en conformité avec le droit international afin qu’il ne serve pas d’instrument pour détenir arbitrairement des journalistes.”
La décision rendue par la Cour suprême va également à l’encontre de celle rendue par le Groupe de travail sur la détention arbitraire (GTDA) des Nations unies, qui avait jugé il y a un an que le journaliste n’avait pas bénéficié d’un procès équitable, que sa condamnation était sans base légale que son emprisonnement était arbitraire.
Outre Ignace Sossou, le Code du numérique a également été utilisé au Bénin pour détenir de manière arbitraire deux autres journalistes, Casimir Kpédjo puis Aristide Hounkpèvi, qui avaient chacun passé sept jours en garde à vue pour avoir prétendument diffusé de “fausses informations”.
Le Bénin a chuté de 36 places au Classement mondial de la liberté de la presse de RSF depuis 2017. Il occupe actuellement la 114e position sur 180 pays.