Alpha Condé, un parcours de démocrate aguerri pour une fin triste

0
758
Alpha Condé

Né le 4 mars 1938 en Guinée, Alpha Condé est homme d’État guinéen. Opposant de longue date aux différents régimes qui ont gouverné la Guinée, il a connu l’exil et la prison.

Il fait son cursus secondaire et universitaire en France où il obtient un doctorat d’État en droit public à la faculté de droit de l’université Paris-I. Alpha Condé commence sa carrière en tant qu’enseignant, chargé de cours à la faculté de droit et sciences économiques de Paris-I. En 1970, Condé est condamné à mort par contumace par le régime du président Sékou Touré et est de ce fait contraint à l’exil. Sous le régime de Lansana Conté, il sera emprisonné pendant plusieurs mois. Durant sa carrière d’opposant, il a acquis le surnom de « Alpha Grimpeur ».

Ce surnom, il le doit à la dureté de la carrière d’opposant en Afrique et en Guinée plus particulièrement. En effet, alors qu’il avait organisé un meeting en 1991, au stade de la Mission de Kaloum, les forces de l’ordre surgirent brusquement et se mirent à disperser brutalement ses militants. Pendant la débâcle, afin d’échapper à la furie des forces de l’ordre, le leader politique grimpa le mur d’enceinte du stade qui abritait le meeting. La presse le surnomma aussitôt « Alpha Grimpeur ». A partir de ce surnom, on créa celui qui permit d’identifier les militants d’Alpha Condé : on les surnomma les « grimpereaux ».

Alpha Condé

Quelques jours après le scrutin présidentiel de 1998 en Guinée, de nombreux dirigeants de l’opposition sont arrêtés pour un présumé complot de rébellion contre le régime en place. Parmi eux, figure Alpha Condé. C’est le début de ce que la presse appela à cette époque « L’affaire Alpha Condé ».

Alpha Condé est maintenu en prison sans procès pendant plus de vingt mois avant que le gouvernement ne se décide à constituer une cour spéciale, pour le juger. Cette violation flagrante des droits de l’homme suscita l’indignation de la communauté nationale et internationale. De nombreuses voix s’élevèrent pour dénoncer cet emprisonnement arbitraire et pour réclamer sa libération immédiate. Parmi elles : Amnesty international. L’artiste ivoirien Tiken Jah Fakoly ira même jusqu’à composer une chanson intitulée Libérez Alpha Condé adressée au général Lansana Conté. Cette chanson deviendra un hymne à la gloire des martyrs et prisonniers politiques africains.

Au terme d’un procès retentissant, Alpha Condé est condamné, en 2000 à cinq ans de prison pour « atteintes à l’autorité de l’État et à l’intégrité du territoire national ». Il est finalement libéré le 18 mai 2001, faisant l’objet d’une grâce présidentielle.

Alpha Condé entouré de ses militants

Après l’interlude de la junte militaire qui a pris le pouvoir à la mort de Lansana Conté, interlude qui a fait apparaître sur la scène publique Dadis Camara et Sékouba Konaté, « Alpha Grimpeur », éternel opposant est élu président de la République de Guinée le 7 Novembre 2010. Il est réélu pour un second mandat en 2015 avec 57,9 % des voix au premier tour.

En septembre 2019, à New York, il propose l’organisation d’un référendum pour modifier la Constitution et briguer un troisième mandat. En réaction, un important mouvement de contestation populaire se constitue ; il s’ensuivra des mois de manifestations qui vont se solder par des dizaines de morts. Le referendum est boycotté par l’opposition, qui accuse le président, Alpha Condé, de se frayer une voie vers un troisième mandat. Le scrutin est marqué par les violences entre manifestants et forces de l’ordre.

Le 18 octobre 20220, Alpha Condé est réélu à l’issue du premier tour de scrutin avec 59,5 % des voix. Son élection est contestée par l’opposition. Le 5 septembre 2021, il est victime d’un Coup d’Etat fomenté par le colonel Mamady Doumbouya.

Alpha Condé aux mains des putschistes le 05 septembre 2021

Le drame de l’Afrique, ce sont aussi ces vaillants opposants qui parvenus au pouvoir à l’issue de scrutins irréprochables finissent par sombrer dans l’ivresse du pouvoir et reproduire les tares des régimes qu’ils ont pourtant farouchement combattus.

Au vieux Président Lansana Conté, qui ne voulait pas quitter le pouvoir, Alpha Condé alors opposant avait lancé à ce dernier : « le poisson pourrit par la tête ». Une pique qui a résisté au temps et qui semble aujourd’hui se retourner vers l’envoyeur. Aujourd’hui, c’est lui qui est pourri.

Arol KETCH – 06.09.2021
Rat des archives