Le rapport n°19/240 du Fonds monétaire internationale (FMI) rendu public en août 2019 est formel : « la corruption est répandue et enracinée au Niger ». Reposant sur les informations disponibles jusqu’au 13 juin 2019, date à laquelle il a été achevé, ce rapport peint un tableau sombre de la corruption dans le secteur public nigérien tout en relevant les points positifs en matière de lutte contre le phénomène.
Dans une récente enquête officielle, citée par le rapport du FMI, la corruption est étendue au Niger. « L’administration des douanes et celle des impôts étant considérées comme les plus corrompues devant la police et les services chargés de la passation des marchés publics. Les organisations politiques, la société civile et les chefs traditionnels ne sont pas non plus épargnés, bien qu’à des degrés divers », indique le rapport qui ajoute que, la politisation des services publics, l’absence de contrôles administratifs et les défaillances du système judiciaire, dont sa capacité limitée à faire respecter la loi, constituent un terrain propice à la corruption dans le pays.
Le rapport a également indiqué que la mise en œuvre effective du cadre juridique et réglementaire de la passation de marchés publics au Niger reste un défi. Selon un diagnostic récent basé sur la méthodologie OCDE/CAD, cité par le rapport, un tiers des marchés publics sont passés par entente directe et par appel d’offre restreint, ce qui est bien supérieur à la norme de 10 % en vigueur dans l’UEMOA. « Le recours excessif aux dérogations aux délais de publicité des appels d’offres ainsi que l’absence d’accès public à leurs résultats et aux statistiques nuisent à la transparence », souligne le rapport.
Le rapport s’est aussi intéressé aux conséquences de la corruption sur l’environnement des affaires et la performance du secteur privé. A cet effet, le rapport note que la lourdeur des procédures réglementaires augmente la probabilité de demandes de pots-de-vin. Selon les enquêtes de la Banque Mondiale auprès des entreprises, citées par le rapport, il faut en moyenne 44 jours pour obtenir un permis de construire au Niger.
« Les délais d’obtention d’une licence d’importation (…) sont plus longs que la moyenne en Afrique subsaharienne. De même, les entreprises privées sont généralement censées offrir des cadeaux ou effectuer des paiements informels pour obtenir des services publics » peut-on lire dans le rapport.
Pour autant, le Niger n’est pas le mauvais élève de la sous-région
Selon le rapport du FMI, bien que la plupart des indicateurs récents de la gouvernance confirment les résultats de l’enquête officielle, la corruption semble en moyenne un peu moins répandue au Niger qu’en Afrique subsaharienne. L’Afro-baromètre indique que, dans presque toutes les catégories de la société, la perception de la corruption [au Niger] est inférieure à la moyenne de l’UEMOA et de l’Afrique subsaharienne.
« Bien que 62 % des répondants au Niger aient le sentiment que le niveau de corruption dans le pays a augmenté l’année précédente, ils sont relativement moins nombreux à mentionner la nécessité de verser un pot-de-vin pour avoir accès aux services publics de base », note le rapport.
L’indice de perception de la corruption de Transparency International (TI–IPC) et l’Indicateur de la gouvernance dans le monde afférant à la maîtrise de la corruption (WGI–CCI) laissent penser que le Niger fait mieux [en matière de lutte contre la corruption] que la moyenne en Afrique subsaharienne.
« En revanche, son score est inférieur à la moyenne de l’UEMOA selon le projet Varieties of Democracy, sauf pour la corruption en matière judiciaire, qui indique dans quelle mesure les particuliers ou les entreprises proposent un pot-de-vin pour faire pencher les décisions de justice en leur faveur », précise le rapport.
Globalement, le rapport du FMI estime que le Niger a sensiblement amélioré ces dernières années sa gouvernance et renforcé son cadre de lutte contre la corruption, mais des lacunes subsistent et la mise en œuvre se heurte à de grandes difficultés.
C’est pourquoi le rapport recommande au pays de remédier aux lacunes persistantes de la législation anti-corruption, d’accélérer la mise en œuvre de la législation anti-corruption, d’améliorer la gouvernance du secteur public en promouvant la transparence, de moderniser les administrations des recettes et promouvoir les bonnes incitations et de s’assurer de la participation des parties prenantes.