Intervention de l’armée française au Niger : la dénégation comme ligne de conduite !

0
1959
(Image d'illustration) Des soldats français déployés dans le cadre de l'opération Barkhane / DAPHNÉ BENOIT / AFP

A ce qu’il semble, la dénégation est la doctrine qui incarne l’intervention des forces françaises en Afrique et particulièrement au Sahel.

Le drame récent de Téra est encore vif dans la mémoire des Nigériens. Trois (03) jeunes qui manifestaient contre le passage du convoi de l’armée française en partance pour le Mali, ont succombé suite à un déluge de balles que les témoins interrogés attribuent de manière péremptoire aux soldats français. Mais curieusement, la métropole a aussitôt exclu d’un revers de la main la responsabilité de ses soldats, en indiquant à fort renfort médiatique, à travers un ses hauts officiers, que ces derniers n’ont fait que des tirs de sommation au moyen des armes non létales.

Comme par hasard, s’il y a mort de civils au cours d’une opération, les soldats français n’en sont pas responsables. La messe est dite ! L’enquête laconiquement annoncée par le ministre de l’Intérieur à l’époque des faits est déjà simplifiée pour ne pas dire achevée, car l’un des protagonistes a dénié toute responsabilité des tueries. Mais qui d’autre était sur le terrain ? Bien évidemment, la gendarmerie nigérienne dépêchée sur place pour garantir le passage du convoi. On peut dire que l’histoire se répète avec cette attitude « irresponsable » des forces françaises qui consiste à fuir leurs responsabilités, et ce, au mépris de l’honneur du soldat.

Lire aussi : Drame de Téra : Le Niger ne doit pas endosser la responsabilité du massacre !

Dans la nuit du 7 au 8 janvier 2011, les gendarmes nigériens qui avaient poursuivis les ravisseurs de 2 jeunes français enlevés au bar-restaurant « Le Toulousain » de Niamey, ont essuyé des tirs au cours d’une opération de sauvetage menée parallèlement avec les forces françaises. L’un des gendarmes nigériens avait publiquement affirmé que lui et ses frères d’armes avaient subi des tirs français. Si une enquête a été ouverte en France sur les conditions de la mort des 2 otages français, les blessures subies par les gendarmes nigériens ont apparemment été classées parmi les dégâts collatéraux.

Le ministre nigérien de l’Intérieur à l’époque des faits, Dr. Ousmane Cissé, dont les propos ont été rapportés par le journal français « Le Nouvel Observateur » (et « Rue 89 »), avait parlé de zones d’ombres dans cette opération : « J’avais donné des consignes à la Garde Nationale et à la Gendarmerie de tout faire pour sauver les otages et de me les ramener vivants. Mon objectif était d’obtenir la libération des otages. Honnêtement, je ne peux pas me mettre à la place des autorités françaises. Moi, personnellement, à mon niveau de connaissance, je ne savais pas qu’une intervention était prévue. J’ai appris qu’un assaut avait été donné le lendemain, par hasard. J’ai perdu deux hommes. Ils sont sortis parce que j’avais donné des instructions et malheureusement, ils ne sont pas revenus. Je ne sais pas qui les a tués. Il y a quand même des zones d’ombre, je pense. »

S’achemine-t-on vers la consécration de la théorie du précédent, car si le communiqué signé par le ministre Alkache Alhada a promis l’ouverture d’une enquête sur ce que d’aucuns appellent désormais « la boucherie de Téra », l’armée française s’en sort à bon compte, comme en 2011 lors des opérations de sauvetage des « otages du Toulousain ».

Une chronique de Saidou Arji