Niger : Près de 2.500 décès du paludisme en 9 mois ; le Covid-19, un moindre mal ?

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(Image d'illustration) / Ph : UNICEF

Depuis mars 2020, le Niger est en état d’urgence sanitaire pour limiter la propagation de la pandémie du Covid-19. Pendant ce temps, le paludisme fait des ravages dans toutes les régions du pays. Les dernières statistiques officielles sur la situation épidémiologique du paludisme sont inquiétantes. Le Covid-19 serait-il le moindre mal qui a cristallisé l’attention des autorités sanitaires du pays au détriment du paludisme ?

Dans une communication présentée en Conseil des ministres du 09 octobre 2020, le ministre de la Santé publique a indiqué que « du 1er janvier au 07 octobre 2020 (9 mois), le Niger a enregistré 2.449.858 cas de paludisme dont 2.449 décès », d’après les chiffres officiels de la Direction de la surveillance et riposte aux épidémies. « Une augmentation de 30% des cas de paludisme et 570 décès de plus par rapport à 2019. Cette augmentation de cas varie de 11% dans la région de Tillabéri à 75% dans la région d’Agadez… », précise la communication du ministre.

Selon la même communication, l’augmentation des cas de paludisme fait suite à une pluviométrie exceptionnelle qui a occasionne des inondations, la stagnation des eaux et la prolifération des moustiques, vecteur de paludisme. Des dispositions ont été prises (distribution de moustiquaires imprégnées d’insecticides, campagne saisonnière de chimio prévention chez les enfants âgés de 3-59 mois, etc.) pour prévenir le pic du paludisme mais cela semble insuffisantes.

Le Covid-19 a fait oublier les priorités sur le paludisme ?

Fin septembre 2020, des acteurs de la société civile ont alerté l’opinion publique sur le manque d’infrastructures sanitaires, de personnels soignants et l’insuffisance des médicaments pour la prise en charge et le traitement du paludisme dans la région d’Agadez. Pendant ce temps, la pandémie du Covid-19, qui a fait 69 morts en 6 mois (selon les chiffres officiels), est au cœur de toutes les actions sanitaires gouvernementales.

En effet, pour faire face à la pandémie du Covid-19, le Gouvernement nigérien a dit avoir adopté et mis en œuvre un plan national de riposte d’un montant estimé à 1.400 milliards de francs cfa. Dans ce cadre, fin mars 2020, une table ronde des partenaires techniques et financiers du Niger a été organisée pour le financement dudit plan. A l’issue de cette table ronde, les promesses de financement s’élèvent à plus de 127,6 milliards de francs cfa. Il s’en est suivi plusieurs autres actions de mobilisation de ressources pour faire à la pandémie.

Le 02 octobre 2020, le Gouvernement a annoncé le maintient de la fermeture des frontières terrestres en de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire dû à la pandémie du Covid-19. Il semble donc évident que la pandémie du Covid-19, dont l’impact réel sur les populations reste mitigé, a évincé les priorités sanitaires en faveur du paludisme qui, on le sait tous, fait plusieurs centaines de victimes chaque année.

Prise en charge du paludisme et perspectives pour 2021

Face a l’ampleur des dégâts, le Gouvernement a annoncé des mesures de prise en charge et de traitement du paludisme. Il s’agit notamment de la mise à niveau de 300 agents de santé sur la prise en charge du paludisme ; et de la mise en place, à parti du 12 octobre 2020, de plus de 1,7 millions tests de diagnostics rapides et 1.583.789 traitements pour couvrir la fin de l’année 2020.

En perspectives pour 2021, le Gouvernement a annoncé l’extension de la campagne de distribution de moustiquaires à toute la région d’Agadez ; l’extension à 6 nouveaux districts d’Agadez et de Tahoua pour les campagnes de la CPS (Chimio prévention saisonnière) chez les enfants de moins de 5 ans ; et l’introduction pour les campagnes à venir des moustiquaires de dernières générations appelées IG2 et PBO dans les districts ayant enregistré des résistances aux insecticides utiles pour l’imprégnation des moustiquaires.

Il est également prévu l’extension à 9 nouveaux districts de l’approche communautaire pour la prise en charge des cas de paludisme à domicile par les relais communautaires dans les villages distants de plus de 5 km d’une formation sanitaire. « Des instructions ont été données pour la redynamisation du programme de la destruction des gîtes larvaires et des moustiques dans le cadre de la coopération médicale avec la République de Cuba », précise le compte rendu du Conseil des ministres du 09 octobre 2020.

Ces actions du gouvernement face aux dégâts du paludisme sont jugées « timides » par plusieurs observateurs. En effet, selon ces derniers, les actions du gouvernement occultent la construction dans les zones reculées les plus touchées, d’infrastructures adéquates de prise en charge traitement des personnes atteintes du paludisme, et la mise à disposition de ceux-ci des médicaments suffisants et efficaces.