Le jeudi 9 septembre dernier, le Bureau du Conseil d’Administration de la Maison de la Presse a suivi avec une grande stupéfaction, la mise en examen par le juge d’instruction du TGI de Niamey, des journalistes Moussa Aksar, Directeur de publication du Journal L’Evénement, également président de la Cellule Norbert Zongo pour le journalisme d’investigation en Afrique de l’Ouest (CENOZO) et Samira Sabou pour « diffamation et trouble à l’ordre public » pour avoir relayé sur Internet, une enquête de Global Initiative sur le trafic de drogue au Niger.
Nos deux confrères sont ainsi poursuivis pour « diffamation par voie de communication électronique » et « diffusion de données de nature à troubler l’ordre public », deux infractions prévues par la loi n°2019-33 du 3 juillet 2019 portant répression de la cybercriminalité au Niger.
Cette inculpation, faudrait-il le souligner, fait suite à la plainte déposée, le 9 juin 2021, au Bureau du Procureur de la République, Près le Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey, par l’Office Central de Répression du Trafic Illicite des Stupéfiants (OCRTIS), contre Global Initiative, une ONG internationale qui lutte contre le crime organisé, en lien avec une de ses publications sur la saisie de 17 tonnes de résine de cannabis, le 02 mars 2021 à Niamey. La justice reproche donc à nos deux confrères d’avoir relayé l’analyse des Experts de Global Initiative sur le trafic de drogue au Niger.
En l’espace d’une année, faudrait-il aussi le souligner, c’est pour la 2è fois que Moussa Aksar est poursuivi en justice qui l’a condamné en mai dernier, à des peines d’amende pour son enquête sur les malversations financières au ministère de la Défense Nationale. Une condamnation dont il a fait appel.
Le Bureau du Conseil d’Administration de la Maison de la Presse considère ces deux situations à l’encontre du journaliste Moussa Aksar et Samira Sabou comme un acharnement contre la liberté de la presse au Niger, un acquis pourtant arraché de hautes luttes par l’ensemble des professionnels des médias nigériens. Il s’inquiète aussi de cette tendance amorcée par le Niger, à travers la loi n°2019-33 du 3 juillet 2019 portant répression de la cybercriminalité pour empêcher aux journalistes d’exercer librement leur profession.
Une tendance qui consiste de plus en plus à contourner l’Ordonnance 2010-035 du 4 juin 2010, portant liberté de la presse au Niger au profit de cette loi liberticide sur la cybercriminalité, à chaque fois qu’un journaliste est poursuivi (pour un oui ou pour un non) devant les tribunaux.
Au vu de ce qui précède, le Bureau du Conseil d’Administration de la Maison de la Presse :
- Déplore l’inculpation du journaliste Moussa Aksar et la blogueuse Samira Sabou et demande l’abandon des charges retenues contre eux au nom du droit à la liberté de presse et d’expression consacré par la Constitution du 25 novembre 2010 ;
- S’insurge contre toutes les velléités constatées ces derniers temps, visant à entraver l’exercice du métier de journalisme au Niger ;
- S’inquiète des dérives graves portées à la liberté de la presse et d’expression et de cette tendance systématique au niveau de la justice à recourir à la loi sur la cybercriminalité pour traiter des faits liés à l’exercice de la profession du journalisme ;
- Rappelle au Président de la République, son engagement pris de veiller au respect des libertés dont la liberté de la presse et d’expression ;
- Demande au Gouvernement d’accélérer le processus d’adoption de la loi sur la presse en ligne.
Le Président du Conseil d’administration