Inondations au Niger : 2025 s’annonce aussi critique que 2024

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A l’aube de la saison des pluies, le Directeur général de la météorologie nationale a lancé une alerte préoccupante : le Niger devrait faire face à des « précipitations excédentaires et anormales » cette année, avec une tendance similaire à celle de 2024, une année déjà tristement marquée par des inondations d’une ampleur inédite.

L’année 2024 restera gravée dans les mémoires comme l’une des plus meurtrières et destructrices en matière d’inondations au Niger. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : près de 396 décès ont été enregistrés, un record par rapport aux années précédentes.

L’effondrement de milliers de maisons a provoqué une crise humanitaire sans précédent, avec plus d’un million de sinistrés, issus de 204 358 menages, selon les données de la Situation des dégâts des inondations du 06 mai 2024 au 28 Octobre 2024 de la Direction des secours humanitaires d’urgence. Cette catastrophe a frappé toutes les régions du Niger, y compris Tillabéry qui concentre à elle seule, la grande portion des localités.

Face à cette situation dramatique, les besoins urgents en abris et en vivres n’ont malheureusement pas pu être entièrement comblés par le gouvernement et les Partenaires Techniques et Financiers (PTF), comme l’illustre le graphique ci-dessous.

 Les Inondations : un fléau récurrent

Si 2024 fut particulièrement dévastatrice, le phénomène des inondations n’est pas nouveau au Niger. Selon le tableau de bord sur les inondations, réalisé par la Communauté d’Afrique Francophone pour l’Ouverture des Données (CAFDO), le bilan humain est lourd : 761 décès ont été enregistrés entre 2020 et 2024.

Sur une période plus longue, de 1998 à 2024, le nombre total de sinistrés est estimé à 5 millions. La région de Tillabéry se distingue comme la plus touchée, cumulant plus de 700 000 sinistrés et représentant plus de 23% des quelques 7 000 localités affectées. Un rapport publié en 2021 par le Projet Adaptation au Changement Climatique, Prévention des Catastrophes et Développement Agricole pour la Sécurité Alimentaire-deuxième phase (ANADIA 2.0) corrobore cette observation. Il indique que «Tillabéry, en valeur absolue, est la région la plus impactée, avec notamment les départements d’Ayerou, Kolo et Say, affichant une incidence totale très élevée. En 2012, Kolo a vu 31% de sa population affectée, contre 29% pour Say et 28% pour Balai Haro en 2012 et 2020. »

La région de Dosso arrive en tête du classement pour l’effondrement des maisons, avec environ 46 000 habitations détruites sur un total de 225 000 à l’échelle nationale. Cette situation s’explique par la multiplicité des types d’inondations qui frappent la région, à savoir « le débordement du fleuve Niger, le ruissellement superficiel et la remontée de la nappe phréatique. Les zones riveraines du fleuve sont périodiquement submergées, avec des conséquences particulièrement graves en 2012, 2013, 2015 et 2020. »

Les inondations ont également un impact dévastateur sur l’agriculture. En 22 ans, le Niger a perdu 205 000 hectares de cultures, dont plus de 117 000 hectares dans la seule région de Tillabéry. Le bétail n’est pas épargné, avec environ 45 000 têtes perdues, la région d’Agadez concentrant la plus grande portion avec 14 000 pertes.

Un phénomène qui touche toutes les régions

Le fléau des inondations s’est généralisé à travers le Niger, touchant différemment chaque région. Maradi a été particulièrement frappée en 2024, occupant la tête du classement pour le nombre de décès, de maisons effondrées et de personnes sinistrées. Les inondations y sont principalement dues au ruissellement de surface, affectant « les départements du sud-ouest comme Madarounfa, Guidan Roumdji et la ville de Maradi, situés dans le bassin fluvial saisonnier de Goulbi, ainsi que les départements du bassin de N’kaba.»

Niamey, la capitale, a également connu de graves inondations entre 1998 et 2020, causées principalement par le débordement du fleuve Niger. Cependant, le rapport souligne que « les inondations pluviales ne sont pas le seul risque hydrologique : les crues soudaines sont également récurrentes en raison de la faiblesse du système de drainage et du manque d’entretien. »

La région de Tahoua est relativement moins affectée, l’année 2024 étant la plus marquante. En 2020, «la plupart de ses départements, à l’exception de Bagaroua et Illela, présentaient une incidence faible à très faible. »

Bien que les inondations n’aient pas durement frappée la région de Diffa, celles-ci sont concentrées « dues aux crues de la Komadougou, rivière tributaire du lac Tchad (Maine Soroa, Diffa) ou aux fortes pluies (Nguigmi). »

Enfin, la région de Zinder a enregistré davantage de dégâts liés aux inondations entre 2020 et 2024, contrastant avec la période 1998-2020 où « aucun département n’avait une incidence totale supérieure à 1 », indiquant que la région était alors moins touchée par le phénomène.

Alors que le Niger s’apprête à affronter une nouvelle saison des pluies potentiellement dangereuse, l’urgence d’actions préventives et d’une meilleure gestion des risques d’inondations se fait plus que jamais sentir pour protéger les populations et leurs biens.

Ismaël Abdoulaye

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