Depuis le coup d’État, les réseaux sociaux et divers médias ont été inondés de fausses informations, attisant la peur et la méfiance entre les communautés de part et d’autre de la frontière nigéro-béninoise. Des rumeurs infondées concernant des mouvements de troupes, des actes de violence, et des intentions malveillantes ont semé la confusion, perturbant les activités économiques et sociales dans la région.
Causes de la Crise
La crise entre le Bénin et le Niger tire son origine du coup d’Etat du 26 Juillet 2023 qui a renversé le gouvernement nigérien en place. Cet événement a entraîné une série de sanctions économiques imposées par la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), auxquelles le Bénin a adhéré en fermant immédiatement ses frontières avec le Niger.
Les relations entre le Bénin et le Niger se sont alors rapidement détériorées, alimentées par des suspicions mutuelles et des allégations de déstabilisation. En octobre 2023, ces tensions ont été exacerbées par une rumeur circulant sur les réseaux sociaux, accusant le Bénin d’abriter une base militaire française près de la frontière nigérienne, supposément destinée à des actions hostiles contre le Niger. Malgré les démentis répétés du gouvernement béninois, cette rumeur a persisté, envenimant les relations bilatérales et plongeant les deux pays dans une crise diplomatique majeure.
Ces suspicions et méfiances ont été confortées par le fait que la France a dans un premier temps voulu passer par le Bénin pour retirer ses soldats installés à Niamey et dont le départ a été exigé par les nouvelles autorités nigériennes. Ces dernières ont refusé ce trajet et les militaires français ont finalement quitté le pays en passant par le Tchad.
La Désinformation autour de la crise
Présence de bases militaires au Bénin
Une vidéo partagée sur les réseaux sociaux notamment sur Tik Tok et largement partagée sur Facebook prétend faussement que les ressortissants français au Niger ont quitté le pays pour se réfugier au Bénin voisin.
La vidéo est virale sur Tiktok et WhatsApp. Publiée le 1er août 2023 par Maiga 777, un compte qui a plus de 15 200 abonnés, la publication a généré 256 likes, 57 commentaires et 54 partages quelques heures après sa publication. Elle montre un groupe d’individus descendant d’un bus devant l’Aéroport Diori Hamani de Niamey. On aperçoit aussi des militaires qui encadrent les passagers du bus. Selon la légende qui accompagne cette vidéo, il s’agit de Français quittant le Niger en direction du Bénin. L’auteur appelle aussi les Béninois à les “chasser”.
Contacté, le gestionnaire du compte Tiktok Maiga 777 a affirmé, sans être à mesure de fournir la moindre preuve, que les Français quittent le Niger pour le Bénin et non pour la France.
Une recherche inversée d’image sur Google avec des captures d’écran de cette vidéo et une recherche sur intérêt avec les mots clés : « la France évacue ses ressortissants du Niger » a permis de retrouver un reportage de TV5 Monde diffusé le 1ᵉʳ août 2023.
L’évacuation des Français et d’autres ressortissants étrangers a débuté le 1ᵉʳ août 2023, 6 jours après le coup d’État qui a renversé Mohamed Bazoum et tous les vols qui ont été organisés par la France avaient pour destination Paris. Ce rapatriement opéré avec l’aval des nouvelles autorités militaires intervient alors que les frontières aériennes et terrestres du Niger étaient fermées.
Lors d’une conférence de presse tenue à Niamey le samedi 18 Mai 2024, Kémi Séba, Président de « Urgences Panafricanistes » avait affirmé ceci : « L’armée française a engagé des légionnaires, noirs de peau, qui se font passer pour des militaires béninois et qui forment une partie de la population qu’ils ont réussie à manipuler, à instrumentaliser et à faire croire que l’ennemi, c’étaient des pays qui, comme par hasard, s’opposaient à l’influence française. Des pays comme le Niger, des pays comme le Mali, des pays comme le Burkina Faso ». Après la réaction d’indignation de nombreux citoyens béninois sur ces affirmations infondées et non soutenues par aucune preuve, c’est au tour du gouvernement béninois de les balayer d’un revers de la main.
En effet, le mercredi 22 Mai 2024, le secrétaire général et porte-parole du gouvernement, Wilfried Léandre Houngbédji, a répondu aux accusations de Kémi Séba. Il a profité de son traditionnel point de presse suivant chaque conseil des ministres pour « recadrer » l’activiste sur ses allégations selon lesquels des légionnaires français noirs seraient présents au Bénin.
L’auteur de cette désinformation profite d’un contexte bien précis pour essayer de donner du sens à ses affirmations : les dirigeants de la CEDEAO ont lancé un ultimatum aux militaires nigériens pour qu’elle cède le pouvoir dans les sept jours suivant le 30 juillet, sous peine d’une intervention militaire.
Le Nigeria et le Bénin sont supposés être le point d’entrée des forces de la CEDEAO au Niger puisque les autres pays frontaliers de ce pays notamment le Burkina Faso et le Mali ont rejeté le principe de cette intervention. Mieux, ils ont déclaré considérer toute agression contre le Niger comme un acte de guerre à leur encontre et s’impliqueront dans les combats.
L’annonce de l’intervention des forces de la CEDEAO a exacerbé la situation sécuritaire dans les zones frontalières entre le Niger et le Bénin avec le renforcement significatif des mesures de sécurité. Ainsi la fermeture des frontières terrestres avec le Bénin et le Nigeria, membres de la CEDEAO, a conduit à une militarisation accrue le long de la frontière fluviale, en particulier dans la région de Dosso, plus précisément dans la ville de Gaya.
Franklin Nyamsi, figure autoproclamée du panafricanisme au Niger était l’un des premiers influenceurs à se lancer dans la danse amplifiant le spectre de l’invasion du territoire nigérien. Et c’est ainsi que sur les réseaux sociaux, des propos alarmistes évoquant le danger de la présence des troupes militaires françaises au Bénin à commencer à prendre corps.
Cette croyance a été confortée le 11 mai 2024 lorsque le Premier ministre du Niger a justifié la fermeture des frontières par la présence supposée des bases militaires françaises, accusant au passage le Bénin d’entraîner des terroristes. La télévision d’État nigérienne a amplifié cette accusation en diffusant des images prétendument probantes, mais qui se sont révélées datées de janvier 2023. Cette manipulation de l’information a exacerbé les tensions, créant une crise diplomatique majeure.
C’est dans ce contexte qu’un internaute a partagé, le 6 mai 2024, une citation sur Facebook, affirmant que le Premier ministre du Niger a déclaré que le Niger était prêt à négocier la réouverture de sa frontière avec le Bénin, sous réserve que le pétrole ne soit pas bloqué.
La déclaration :
Capture d’écran de la déclaration attribuée au Premier ministre du Niger sur Facebook. /Aïr-Info
Trois heures après sa publication, le post a généré 77 commentaires, 82 réactions et a été partagé 5 fois sur Facebook. Il a aussi été repris (en capture d’écran) par d’autres internautes sur Facebook.
Le post de cet internaute sera démenti par une vérification menée par le journal indépendant Aïr-Info.
La vérification :
Suite à cette allégation, la rédaction de Aïr-Info a joint le Premier ministre, Lamine Zeine, pour obtenir une clarification. Ce dernier nous a affirmé n’avoir pas fait cette déclaration, affirmant que « c’est faux ! Je n’ai jamais tenu ces propos ». Il a également précisé que, « si ce blocage devait survenir, il reviendrait d’abord aux Chinois de régler l’affaire avec les Béninois. Le Niger, quant à lui, s’en tiendrait au contenu de l’Accord. »
Le Premier ministre a également souligné que la partie béninoise a confirmé, à travers des correspondances, son engagement à ne pas entraver le transit des hydrocarbures.
Quelle serait la motivation de cet internaute à attribuer au Premier ministre des propos qu’il n’a jamais prononcés ? L’intéressé étant membre de la cellule de communication du Président déchu Bazoum Mohamed, suggère que les nouvelles autorités du Niger peuvent faire fi de la sécurité et privilégient les recettes pétrolières.
Sur cette vidéo d’une durée de 45 secondes, plusieurs dizaines d’hommes et de femmes en tenue militaire marchent dans la même direction. On les entend s’exprimer en français dès la 13ème seconde : « Ça va ? C’est fini ?« , lance une voix au timbre masculin.
« Voici un des « petits camps militaires destinés à sécuriser le Bénin » dont parle le porte-parole du gouvernement béninois pour justifier la présence des forces françaises dans le Nord du pays« , avancent certains messages en légende. Mais attention, cette vidéo est décontextualisée. Ces images ne sont pas récentes. Elles avaient déjà fait l’objet d’un article de vérification publié par le média malien Benbere en juin 2021. A cette période, de nombreux posts Facebook prétendaient qu’elle était la preuve du retrait des forces françaises du Mali. Ces images ne sont donc pas d’actualité et n’ont rien à voir avec la crise diplomatique engagée entre le Niger et le Bénin contrairement à ce qu’affirment, à tort, de nombreux internautes sur Facebook.
Un reportage ancien
En parallèle de la vidéo décontextualisée que nous vérifions, la Radio-Télévision du Niger (RTN), média d’Etat nigérien, a diffusé le 10 mai 2024 un sujet télévisé visionné plus de 17.000 fois sur sa page Facebook
« Contrairement à la version des autorités béninoises, le nord Bénin abrite bien une base secrète française« , avance la voix-off dès les premières secondes de la vidéo, assurant pouvoir se baser sur plusieurs témoignages.
La télévision publique nigérienne s’appuie notamment sur les images d’un reportage du média français Le Média… qui date en réalité de janvier 2023, comme le souligne son auteur sur X, le journaliste Thomas Dietrich :
« La télévision publique du #Niger a utilisé (et tronqué) un de mes reportages pour faire croire qu’il y aurait une base secrète de militaires français au nord du #Bénin« , a-t-il déclaré le 12 mai . « Mon reportage au nord du Bénin date de janvier 2023, soit six mois avant le putsch contre Mohamed Bazoum. Les militaires français présents à Kandi n’avaient donc pas pour objectif de déstabiliser le pouvoir nigérien, à l’époque très francophile« , précise le journaliste.
A l’époque du reportage, le Niger abritait d’ailleurs des bases militaires françaises et américaines sur son territoire. C’est après le coup d’Etat qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum en juillet 2023, que le régime militaire a exigé le départ des soldats de l’ancienne puissance coloniale française, puis américains. Les derniers soldats français ont quitté le sol nigérien le 22 décembre 2023. Le désengagement américain a débuté et doit s’achever avant le 15 septembre 2024.
Le reportage du journaliste Thomas Dietrich, tourné en janvier 2023, n’atteste d’ailleurs pas d’une base militaire française mais de la présence d’instructeurs de l’armée française dans le nord du Bénin, à Kandi.
Son enquête interroge sur le rôle effectif des militaires français présents au Bénin, sans apporter une réponse claire : sont-ils seulement des instructeurs ? Ou opèrent-ils directement au côté de l’armée béninoise ?
Fake News et Frontière Niger-Bénin : La Confusion Provoquée par de Fausses Annonces d’Ouverture
Les 24 et 25 août 2024, alors qu’une délégation nigérienne séjournait à Cotonou pour rencontrer le président béninois Patrice Talon, des rumeurs infondées et de fausses informations ont envahi les réseaux sociaux, affirmant l’ouverture imminente de la frontière entre le Niger et le Bénin.
Tout a commencé avec la publication d’un internaute annonçant la reprise du trafic des bus vers Malanville, la ville béninoise frontalière du Niger. https://web.facebook.com/share/p/PGP2jALbj6HC95JT/
Cette information a rapidement circulé, provoquant de l’excitation parmi les populations des deux pays. Il est important de rappeler qu’en raison de la fermeture des frontières, les bus en provenance du Bénin avaient pour arrêt final la ville de Kandi, située à environ 110 km de la frontière nigérienne. L’annonce de la reprise du trafic jusqu’à Malanville, ville béninoise frontalière située à la rive du fleuve Niger a donc suscité des espoirs, mais aussi une grande confusion.
Cependant, cette information s’est révélée fausse. Les frontières n’ont pas été rouvertes, et la situation est restée inchangée. Les populations locales, prises au piège de cette désinformation, ont été désillusionnées après avoir découvert la réalité et fondé de nombreux espoirs.
Au cours des mois précédents, d’autres fausses informations ont continué de circuler, y compris des vidéos détournées de leur contexte. Par exemple, une vidéo montrant un camion en file d’attente à la frontière, filmée quelques jours après le coup d’État du 26 juillet 2023, a été maintes fois partagée, prétendant que la frontière était à nouveau ouverte.
Ces fausses nouvelles, souvent partagées avec des intentions malveillantes, visent à semer la confusion et à déstabiliser la situation. Elles exploitent les espoirs et les frustrations des populations locales, aggravant les tensions dans une période déjà marquée par l’incertitude.
La désinformation comme outil de séparation des peuples
La désinformation sur les réseaux sociaux exacerbe les tensions entre les populations des deux pays. Les accusations mutuelles et les fausses nouvelles créent un climat de méfiance et d’hostilité. Les familles et les communautés transfrontalières, autrefois unies par des liens culturels et économiques, sont maintenant divisées par des suspicions et des préjugés. Les échanges culturels, les mariages et les amitiés transfrontalières en souffrent, créant une fracture sociale profonde.
Témoignages
Mariam, commerçante à Gaya, déclare que « Avant, j’achetais mes marchandises à Malanville et je les revendais ici au Niger. Maintenant, avec la fermeture des frontières et toutes ces histoires de bases militaires, je ne peux plus faire mes affaires comme avant. Les gens se méfient même de nous, comme si nous étions des espions. »
Issa, chauffeur de camion originaire de Parakou au Bénin :
« Je transporte des marchandises entre le Bénin et le Niger depuis des années. Depuis cette crise, c’est devenu impossible. On entend des rumeurs partout, et cela rend notre travail très difficile. »
Aminatou, résidente à Cotonou : « Ma famille est nigérienne, et nous avons toujours eu des relations proches avec nos parents résidant au Niger. Maintenant, ils nous disent qu’on ne peut plus venir les voir, qu’il y a trop de tension. C’est comme si une barrière invisible nous séparait. »
Sur les réseaux sociaux comme Facebook, la vague de méfiances s’agite aussi.
La crise entre le Niger et le Bénin illustre comment les réseaux sociaux peuvent être utilisés pour manipuler l’information et amplifier les tensions diplomatiques. Alors que les efforts de médiation se poursuivent, il est crucial de lutter contre la désinformation pour rétablir la confiance et la paix entre les deux nations.
Des influenceurs sur Facebook et Twitter ont joué un rôle clé dans la diffusion de cette fausse information. En partageant et commentant les images avec des messages alarmistes, ils ont contribué à polariser davantage les opinions. Leur large audience a permis à la rumeur de se propager rapidement, créant un climat de peur et de suspicion.
Le contenu et le ton des publications souvent sensationnelles ont même entraîné une nouvelle vague de soutien au CNSP pour le maintien de la fermeture de la frontière Niger – Benin, avec parfois des appels à la méfiance entre les peuples.
Un autre post plus récent du Média panafricains FL24 annonce l’atterrissage d’un avion à Kandi avec des kilométrages erronés, enfonce le clou et alarme davantage la population de Gaya prise entre peur et devoir de résistance.
« J’ai été réveillé et j’ai vu cette publication, cela m’a donné de la haine envers le peuple béninois et son président » a expliqué Abdourahmane, un natif de Gaya. Plusieurs autres publications similaires tant des web médias que des individus non identifiés avec des buts non avoués se sont répandues sur les réseaux sociaux.
Les Conséquences de la Désinformation sur la Crise Niger-Bénin après le Coup d’État du 26 Juillet 2023
La crise politique au Niger consécutive au coup d’État du 26 juillet 2023, a rapidement débordé au-delà des frontières, affectant particulièrement la région frontalière de l’espace Dendi Ganda, qui relie le Niger et le Bénin. Dans cette zone, où les populations partagent une histoire, une culture, et des liens familiaux, la désinformation a émergé comme un facteur aggravant, perturbant la cohésion sociale, les activités quotidiennes, et la sécurité.
Un agriculteur de Kwatcha village nigérien proche de la frontière Niger – Bénin, : « Nous avons entendu dire que des milices allaient envahir notre village, ce qui a poussé beaucoup d’entre nous à abandonner leurs champs pendant plusieurs jours. Ces rumeurs ont causé plus de peur et de trouble psychologique que la crise elle-même. »
Pour comprendre l’origine et l’impact de cette désinformation, nous avons rencontré Ali Ayouba, un expert en cybercriminalité basé à Gaya. Selon lui, « les fausses informations diffusées dans le contexte de la crise Niger-Bénin sont souvent le fruit de manipulations orchestrées par des groupes aux intentions diverses. Certains cherchent à déstabiliser la région pour des gains politiques ou économiques, tandis que d’autres profitent du chaos pour semer la discorde entre les communautés frontalières. »
Il ajoute : « Les réseaux sociaux sont un terreau fertile pour la propagation de la désinformation, surtout dans des contextes de crise où les populations sont vulnérables et en quête de réponses rapides. Il est essentiel que les autorités locales et les plateformes en ligne prennent des mesures pour limiter la diffusion de ces contenus nuisibles. »
La Menace sur la Cohésion Sociale et la Sécurité
La désinformation ne se limite pas à perturber les activités économiques ; elle menace également la cohésion sociale et la sécurité dans l’espace Dendi Ganda. Les populations de cette région, historiquement unies par des liens de sang et de culture, commencent à se méfier les unes des autres, exacerbant les tensions communautaires. Des incidents mineurs, amplifiés par des rumeurs, risquent de dégénérer en conflits plus graves, avec des conséquences dévastatrices pour la paix et la stabilité locales.
« Dans la nuit du jeudi au vendredi 18 Août 2023, aux environs de 02 heures du matin une pirogue motorisée avec 06 passagers à bord, composée du barreur de nationalité nigériane, 04 passagers de nationalité nigérienne et 01 passager de nationalité béninoise, mais d’origine nigérienne a quitté Malanville à destination de Gaya (au Niger) », informe le procureur de la République près le tribunal de Malanville, Paul Richard da Matha à travers un communiqué.
Une information qui s’est très vite amplifiée sur le réseau social Facebook et WhatsApp en dressant un bilan erroné et un message alarmiste.
Moussa Alassane, sociologue, explique : « L’espace Dendi Ganda a toujours été un modèle de coexistence pacifique entre les peuples du Niger et du Bénin. Cependant, la désinformation actuelle fragilise ces liens, et la confiance entre les communautés dégringole. »
Acteurs de la Manipulation : qui sont-ils ?
Kémi Séba, de son vrai nom Stellio Gilles Robert Capo Chichi, est un militant panafricain béninois, anciennement français avant d’être déchu de sa nationalité en juillet 2024. Il est également conseiller spécial du président du Niger à partir d’août 2024 et bénéficie d’un passeport diplomatique nigérien, visiblement pour « services rendus ».
Franklin Nyamsi est un professeur agrégé de philosophie, originaire du Cameroun et citoyen français d’adoption, connu pour son travail dans la démocratisation et le cosmopolitisme du continent africain.
Nathalie Yamb est une militante politique pro-Kremlin, influenceuse, et web vidéaste helvético-camerounaise, née en Suisse. Elle est très active sur les réseaux sociaux et est connue pour ses positions radicales.
Pour plus d’informations détaillées, je vous recommande de consulter les sources fournies.
Kemi Seba, Franklin Nyamsi, et Nathalie Yamb sont des militants panafricanistes connus pour leur engagement politique en Afrique. Ils ont été impliqués dans des activités au Niger, notamment en soutenant le peuple nigérien et les autorités de transition dans leur lutte pour la souveraineté et en exprimant des positions hostiles à la France.
La montée des mouvements anti-français en Afrique, particulièrement au Niger, révèle une vague de ressentiment contre l’influence de la France. Ces sentiments sont souvent alimentés par des figures comme Kemi Seba, Franklin Nyamsi et Nathalie Yamb. Kemi Seba, anciennement accusé d’antisémitisme, se montre aujourd’hui comme un fervent défenseur du panafricanisme et des alliances avec la Russie, soutenant les putschistes au Niger. Franklin Nyamsi, professeur controversé, critique vivement la Françafrique tout en affichant une affinité avec Alexandre Douguine et Assimi Goïta. Nathalie Yamb, surnommée « la Dame de Sotchi », est active sur les réseaux sociaux.
Tous trois cumulent des millions d’abonnés sur les réseaux sociaux. Grâce à leurs discours simples et accessibles, ils parviennent à mobiliser de nombreux adeptes autour de leur vision radicale. Ce soutien numérique amplifie leur influence et renforce les mouvements anti-français et pro-russes, particulièrement en lien avec le CNSP au Niger.
Les principaux acteurs de cette manipulation de l’information incluent des influenceurs locaux comme Bana Ibrahim, militant d’un parti politique et supporter de la junte au pouvoir à Niamey. Il a fait plusieurs posts en lien avec la crise et qu’il a supprimés par la suite. A l’opposé, on retrouve des membres de la cellule de communication du pouvoir déchu comme Abdou Pagoui, Hamid Amadou N’Gadé etc. On y retrouve également des personnes anonymes qui partagent dans les groupes WhatsApp et Facebook, souvent organisés en groupes pour maximiser l’impact de leurs messages.
Techniques et sujets de manipulation
Les manipulateurs utilisent diverses techniques, telles que la diffusion de vidéos et d’images anciennes sorties de leur contexte. Par exemple, en mai 2024, la télévision d’État nigérienne diffusait des images prétendant prouver la présence de bases militaires françaises au Bénin, alors que ces images dataient en réalité de janvier 2023, bien avant le coup d’État au Niger. Ce genre de manipulation exacerbe les tensions, en alimentant des rumeurs qui se propagent rapidement sur les réseaux sociaux.
Les sujets que les auteurs de la désinformation privilégient tournent au tour de la fibre patriotique, de la souveraineté, la peur de l’autre, toutes choses qui empruntent à la propagande que certains groupuscules marginaux mènent dans d’autres pays ou régions.
La crise entre le Niger et le Bénin illustre comment les réseaux sociaux peuvent être utilisés pour manipuler l’information et aggraver des tensions diplomatiques. Alors que des efforts de médiation sont en cours, il est crucial de combattre la désinformation pour rétablir la confiance entre les deux nations. Les autorités des deux pays, ainsi que les plateformes de réseaux sociaux, doivent intensifier leurs efforts pour contrer la propagation de fausses informations et protéger les populations des conséquences de cette guerre d’information.
La crise actuelle n’est pas seulement un conflit diplomatique, mais une bataille pour l’intégrité de l’information et la stabilité sociale. Les populations des deux pays, prises en otage par la désinformation, subissent les conséquences graves de ces manipulations. Il est impératif de promouvoir la vérification des faits et la responsabilité des acteurs de l’information pour éviter de telles crises à l’avenir.
Par le passé, le différend frontalier entre le Bénin et le Niger au sujet de l’Île de Lété, a été une source de tensions pendant plusieurs décennies. Mais en 2005, ce contentieux territorial qui date des années 1960,a été tranché par la Cour internationale de justice (CIJ) qui a décidé du rattachement de l’île de Lété au Niger. Pourtant, il n’y avait pas eu autant de désinformation et de manipulation de l’information à cette époque où les réseaux sociaux sous leur forme actuelle n’existaient pas. Ce qui démontre à outrance le rôle actuel des nouveaux médias dans l’exacerbation de la tension entre deux pays et leurs populations respectives.
Fhadel ALOU
Cette enquête a été réalisée dans le cadre du projet « Révéler la vérité grâce à OSINT » mis en œuvre par le journal « L’Evènement » en collaboration avec le Centre pour l’Innovation du Journalisme et le Développement (CJID) et OSF Africa.