Cherté de la vie au Niger : le gouvernement prend d’importantes mesures d’allégement fiscal

0
1592

Le gouvernement nigérien a annoncé avoir pris d’importantes mesures d’allégement fiscal afin de lutter contre la hausse des prix des produits alimentaires et alléger les souffrances des populations. L’annonce a été faite, le samedi 19 mars 2022, lors d’une rencontre entre les membres du gouvernement et les opérateurs économiques à Niamey.

La rencontre présidée par le premier ministre, Ouhoumoudou Mahamadou, fait suite à celle du 02 mars au cours de laquelle, le chef du Gouvernement a noté les difficultés auxquelles sont confrontés les opérateurs économiques : les marchandises à destination du Niger en rade au port de Cotonou ; des redevances sur les produits chimiques ; des redevances sur les produits de l’élevage ; les tracasseries sur le corridor routier ; le visa obligatoire des experts-comptables sur les bilans ; le montant de l’impôt synthétique ; la facture certifiée ainsi que les taxes douanières sur un certain nombre de produits de grande consommation.

Des réponses favorables

Face à cette situation qui engendre la hausse du prix de certains produits, le chef du Gouvernement a annoncé un certain nombre de mesures. En ce qui concerne les bateaux de marchandises en rade au port de Cotonou au Bénin, il a indiqué que le dossier a été pris en charge par le ministre des Finances et le ministre des Transports. En rapport avec les autorités du Bénin, il a été accepté que les bateaux à destination du Niger qui transportent des produits de première nécessité soient à quai. « Actuellement, ces bateaux sont à quai en train de décharger et certains produits sont en train d’être acheminés sur le Niger », a-t-il déclaré.

En ce qui concerne les redevances sur les produits chimiques, le chef de Gouvernement a annoncé que la parafiscalité qui était de 10% a été ramenée à 3%, sauf pour les produits miniers. Pour les produits de l’élevage, une réduction de 50 à 90% a été faite selon les produits. Pour ce qui est des contrôles routiers, des accords ont été trouvés, a annoncé le premier ministre, soulignant la volonté du gouvernement à veiller à ce que ces accords soient mis en œuvre. S’agissant particulièrement les tracasseries routières, il a indiqué que les contrôles de police et de gendarmerie sont réduits au maximum. « Il y a une réduction drastique des contrôles qui fait que par exemple, en quittant Niamey pour aller à Zinder, il n’y aura pas plus de 5 contrôles », a-t-il signifié.

Pour le visa des experts-comptables, il sera suspendu pour cette année pour ce qui est des impôts, et ce compte tenu des préoccupations liées à la facture certifiée, selon le premier ministre. Par contre, souligne-t-il, pour ce qui concerne les banquiers, les institutions financières peuvent exiger des opérateurs économiques que leurs bilans soient certifiés par un expert-comptable.

S’agissant de l’impôt synthétique, Ouhoumoudou Mahamadou a fait savoir qu’il n’y a pas eu de relèvement de l’impôt synthétique. Par ailleurs, il a annoncé qu’en cas de contestation de calculs de l’impôt par les inspecteurs des impôts, un comité paritaire a été mis en place le 15 mars dernier pour vérifier et examiner les contestations.

Pour la facture certifiée, qui constitue un grand point de préoccupations pour les opérateurs économiques, elle va être progressivement élargie à presque tous les opérateurs pour éviter la concurrence déloyale, a indiqué le chef du Gouvernement. Ensuite, poursuit-il, compte tenu de la baisse des coûts de la machine certifiée, le nombre de distributeurs a été élargi et les coûts ont baissé. « De plus en plus, le ministère va insister pour que tout le monde s’y conforme, y compris les opérateurs économiques qui sont à l’intérieur du pays », affirme Ouhoumoudou Mahamadou.

En ce qui concerne le précompte ISB, il a fait savoir que le ministère des Finances est en train d’étudier une formule d’incitation en faveur des opérateurs économiques qui font le prélèvement à la source. Pour les contrôles inopinés et fréquents, le premier ministre a annoncé que les instructions ont été données aux services des impôts pour désormais ne contrôler que les cas avérés de soupçon de fraude.

Des propositions de désarmement tarifaire 

Au cours de la rencontre, Ouhoumoudou Mahamadou a indiqué que des propositions ont été faites pour le désarmement tarifaire sur plusieurs produits. Selon lui, « toutes les prévisions de dépenses ont été faites et c’est les recettes prévues qui doivent faire face aux dépenses qui sont prévues ». Par conséquent, « toute réduction d’impôts se traduira par un accroissement du déficit fiscal sur lequel nous avons pris l’engagement de le limiter à 6,5% du PIB ».

Toujours selon le premier ministre, le gouvernement va essayer de continuer encore le désarmement tarifaire en essayant de voir, à travers le prochain collectif, qu’est-ce qui peut être supprimé comme dépenses. Et « cela va se traduire certainement par un manque à gagner au niveau des impôts », a-t-il indiqué en précisant que « ce manque à gagner est estimé à près de 7 milliards de FCFA ».

Pour l’huile, « sur un bidon de 25 litres, au lieu de 3 380 de prélèvement, ça retombe à 2 551. Pour la farine de blé, la baisse de près de 34,35% fait que le droit passe de 68 100 francs à 50 000 sur la farine extracommunautaire et ce qui fait qu’on revient aux mêmes tarifs, quelle que soit l’origine de la farine. Pour la farine communautaire, la réduction passera de 1 381 à 600 et pour la farine extra communautaire, la réduction passe à 910 francs », a détaillé le chef du gouvernement.

Selon le ministre des Finances, Ahmat Jidoud, l’abattement de 17% sur le prix du sucre, toutes origines confondues, entrainera une baisse de 100 f par sac 100 kg qui passera de 1 231 f à 1 000 f et pour le sucre extracommunautaire, c’est une baisse 463 f qui ferait passer le droit de douane de pratiquement 5 700 f à 5 200 f.

Prenant la parole, le président de la Chambre de Commerce, Moussa Sidi Mohamed, a également souligné quelques réductions des taxes sur certains produits. « Les taxes sur le lait, par exemple, il y avait 10 000 F qu’on prenait sur une tonne de lait. Dorénavant, ça va être 500 F par tonne de 0 à 20 tonnes et 600 F par tonne de 20 tonnes à plus », a-t-il illustré.

En outre, il a expliqué que sur beaucoup de produits, il y a des baisses allant de 50 à 75%, surtout, ceux privilégiés d’exportation. « Au niveau de l’exportation, avec la compréhension des différents ministres, on est allé même jusqu’à 90% de baisse pour inciter à l’exportation de nos produits », a indiqué Moussa Sidi Mohamed. « Au niveau de l’environnement, tout ce qui est industrie agroalimentaire et des industries de transformation, de 10 % on est revenu à 3% », a-t-il ajouté.

Pour le premier ministre, « tout cet exercice, c’est pour que ça se traduise par une baisse pour les consommateurs ». « Nous comptons vraiment sur vous pour que ces baisses-là ne soient pas des subventions aux opérateurs économiques. Donc ça soit des subventions aux consommateurs », a-t-il dit aux opérateurs économiques en annonçant la mise en œuvre, par le gouvernement, de plusieurs programmes allant dans le sens d’alléger les souffrances des populations.

Des préoccupations persistent sur la facture certifiée

Les opérateurs économiques ont tour à tour pris la parole pour exprimer leurs ressentis face à ces mesures prises par le gouvernement. Dans leur ensemble, ils ont salué les initiatives leur allégeant certaines charges fiscales. Cependant, force est de constater que des préoccupations persistent encore quant à l’utilisation de la facture certifiée. Pour eux, elle pénalise ceux qui y sont assujettis en entrainant notamment la concurrence déloyale.

Pour le ministre des Finances, la meilleure solution, c’est de faire de la facture certifiée une obligation dans les pièces à déclarer au niveau de la douane dans le cadre de procédure du dédouanement pour minimiser la concurrence déloyale. Sur la préoccupation concernant l’ISB, Ahmat Jidoud a affirmé que la question fera l’objet d’une étude pour voir ses implications et voir « quelles sont les formules à proposer pour pouvoir moduler l’utilisation ou la facturation de l’ISB, notamment à ceux qu’y sont assujettis ».